Erin Phillips

Je suis jolie. Ça c'est indéniable. Même si j'ai eu une adolescence difficile où j'étais du genre boulotte avec une acné persistante, l'entrée dans le monde des adultes m'a permit de m'affiner. Je n'ai pas grandi depuis cette époque là, faisant un mètre 67. Il faut aussi dire que ma première poussée m'a conduit à l'hôpital. J'avais 17 ans. C'est là que j'ai perdu tout mon surpoids, entre la rémission et la déprime alors qu'on me disait que j'étais atteinte de sclérose en plaques. Mon monde s'est écroulé ce jour là. Et bizarrement, cela m'a transformée. La chenille est devenue papillon. Un déclic, une envie irrépressible de vivre, de plaire, de profiter. Je suis devenue jolie, mes formes restant féminines sans être trop rondes. J'ai une poitrine attrayante, un ventre plat, des membres fins, des fesses musclées, des hanches légèrement évasées. je n'ai pas le profil d'une anorexique, ni d'une malade. Mais je fais du sport pour combattre cette foutue maladie.
Mon visage garde quelques rondeurs charmantes. J'ai le teint pâle, des cheveux mi long, couleur chocolat, assortis à mes yeux, marrons, pétillants de vie. J'ai le sourire facile. Je préfère rire que pleurer.
Côté vestimentaire, je suis plutôt classique, adorant le jean slim, les T shirts un peu délirants avec une veste de costume. Mais j'aime autant les robes, les jupes, selon mon humeur.

Je suis quelqu'un de facile à vivre qui ne se prend pas la tête. j'ai une philosophie : de vivre chaque jour comme s'il devait être le dernier. Je ne mourrais pas demain, mais je peux tout aussi bien ne plus voir, ne plus pouvoir bouger mes doigts, ou mes jambes... Je sais ce qui m'attend à plus ou moins long terme. Je ne sais juste pas quand. Alors je profite de la vie, je fais toutes sortes de choses dingues que je n'aurais jamais osé faire avant. Je suis devenue une séductrice, collectionnant les aventures avec les hommes, sans honte, sans tabou. Tout est matière à avoir du plaisir, car un jour, je n'en ressentirais plus aucun. Alors je vis à fond. J'aime, je désire, je pleure, je déteste... Je ne suis pas de mauvaise compagnie, je ne me plains jamais, je ne me morfonds pas, cela ne sert à rien. Autrefois, j'ai professeur de musique, mais j'ai du me reconvertir, incapable de pouvoir jouer d'un instrument bien longtemps sans souffrir... Je suis souvent fatiguée, j'ai souvent mal partout, mais je ne me laisse pas abattre. Je ne parle pas de ma maladie, personne ne sait de quoi je souffre, je le cache, pour ne pas me faire plaindre, pour ne pas avoir de traitement de faveur. Suis-je courageuse? je ne sais pas, car j'ai peur. Tout au fond de moi, je suis terrifiée. Terrifiée de ne plus pouvoir bouger un jour... Et seule, désespérément, car je ne laisse personne approcher suffisamment pour ravir mon cœur. Car il me ferait souffrir. Vivre avec moi, l'exposerait à partager mon enfer personnel dans quelques années et alors, il me quitterait. Quand j'aurais le plus besoin de lui.

Ma vie aurait été très banale si je n'avais été frappée par la maladie. Je suis née dans un petit village pittoresque comme il en existe tant dans la campagne anglaise. Je venais rejoindre une fratrie qui comptait déjà un frère et une sœur. Je fus la dernière. Que dire de mon enfance? Pas grand chose... Enfance normale, tout ce qu'il y a de plus classique. Sorties entre amis pour faire du vélo ou aller à a maraude, construisant une cabane en bois dans un arbre sans jamais réussir à l'achever. Nous étions une bande de gamins insouciants, heureux. Encore maintenant, je bénis ces années qui ont un si joli goût de mélancolie, une époque révolue mais chérie

Quand je suis entrée au collège, j'ai du aller en pensionnat. Quitter mon cocon familial. Mais mes parents voulaient le meilleur pour moi et j'intégrais une école privée. J'étais alors une gamine de 10 ans, empâtée, timide, gauche. Je me fis pourtant des amis, je me découvris une passion pour la musique et j'appris le violoncelle et le piano. Je m'épanouissais au travers de la musique. Je grandis, dans l'indifférence, étant une excellente élève. Dans le genre intello mal fringuée.

Et à 17 ans, ma vie bascula. Je voyais de moins en moins bien, j'avais des douleurs horribles et les ophtalmo ne trouvaient pas ce que j'avais. Je ne comprenais pas ce qui m'arrivait. Je fus finalement conduite à l'hôpital, où j'eus le droit à toute une batterie de tests. Les choses revinrent à la normale... Et on m'annonça que j'étais atteinte d'une sclérose en plaque... Peu à peu mes fibres nerveuses se démyélinisaient. Oui, je savais ce que cela voulait dire, j'avais fait de la biologie en cours. On m'expliqua que les symptomes apparaissaient pendant que la myéline se détruisait et qu'ils s'amélioraient quand ça cicatrisait. Partiellement, jamais totalement. Ils ne pouvaient pas me dire comment cela évoluait. Cela dépendant des gens. Je pouvais très bien vivre normalement jusqu'à 50 ans, ou finir en fauteuil roulant à 25 ans... Mon monde s'effondra. je refusais de m'alimenter, de parler. Je ne voulais pas de cette vie là, je voulais ma vie d'avant, je ne voulais pas savoir comment j'allais finir...

Et puis, avec le temps, avec l'aide de cette psychologue aussi, j'ai fini par accepter. A considérer chaque jour comme un sursis. Je ne devais pas perdre le temps qu'il me restait à me lamenter ainsi. Je devais profiter. Je repris goût à la vie, ma philosophie changeant du tout au tout, même si la terreur resta toujours nichée à l'intérieur de moi. Je devins une autre. Épanouie, jolie, coquette. Je retournais au lycée, je passais mon bac, je l'obtins avec mention, avant de partir au conservatoire. Je voulais vivre de la musique et je voulais l'enseigner. C'est ainsi que je devins professeur de musique. Il y eu d'autres crises... Ma vue baissa et rien ne pouvait la corriger totalement. Mes mains se firent moins souples et je ne pus plus enseigner la musique. Oh j'aurais pu, mais c'était un crève cœur que de ne pouvoir toucher un instrument. Je ne pouvais plus jouer comme avant. Néanmoins, j'aimais les enfants, les aider, leur apporter quelque chose. Alors je me réorientais, devenant conseillère d'orientation. Confidente. Je sais attirer la confiance naturellement.

Parallèlement, ma vie sentimentale fut de plus en plus chaotique. Débridée. Je connus les joies d'être aimée, mais jamais je ne commis l'erreur de tomber amoureuse. Quand j'étais proche de le faire, je fuyais. D'ailleurs, si je me retrouve à Londres, dans ce lycée, c'est bien pour fuir mon ex, trop amoureux. Trop beau, trop attentif, trop charmant.

Pardonne-moi, mais je ne t'entrainerais pas dans mon enfer.