Le fou du roi | Iago

J'allais les tuer... Tous les deux. Ciel et cette sale petite vipère. Mais qu'est-ce que ce gamin fichait chez elle, dans son agence? Je n'aimais pas ça, pas du tout. Il avait du deviner que Wilha avait été ennuyée par Azraëlle. Ce gamin était trop perspicace pour son propre bien. Mais je n'aimais pas qu'il remonte jusqu'à cette ange. Il l'avait déjà croisé une fois, ça suffisait. Il ressortit de l'immeuble, apparemment contrarié. J'allais avoir le droit à une scène quand je rentrerais. Pensait-il vraiment que j'allais partir à Paris alors qu'il était en danger? Il me prenait vraiment pour un idiot.

Rageur, je rentrais à mon tour dans l'immeuble, laissant la limousine s'éloigner avec Ciel. Il ne fut pas bien difficile de trouver le bureau de la directrice. Un peu de charme à la secrétaire et le tour était joué. Si bien que je me dirigeais jusque chez Azraëlle, vêtu d'un complet chic et onéreux. Je frappais alors à la porte, l'ouvrant sans attendre que l'on m'invite à entrer, la refermant derrière moi pour m'y adosser, bras croisés.

- "Bonjour mon ange."

Mon être vibrait de colère, mais je me contenais. Doucement, je me décollais de la porte pour venir la rejoindre, m'asseyant sur son bureau avec nonchalance.

- "Ma chère, je dois avouer que je suis... contrarié? Ciel est un sale gosse qui n'en fait qu'à sa tête, mais il est un peu trop perspicace et tenace."

Je plantais mon regard noir dans le sien. Je savais qu'elle jubilait et je détestais cela. Effectivement, elle avait un temps d'avance sur moi. Ciel était venu de lui-même, sans m'en parler. Il se méfiait de moi et je perdais mon emprise sur lui et ça, Azraëlle le savait.

- "Je suppose qu'il est venu te voir pour Wilha. Quel mensonge lui as-tu donc servi?"

Je la regardais passer ses nerfs sur sa pauvre secrétaire qui se fit licencier sans autre forme de procès. Avec un sourire en coin, je me permis une petite remarque :

- "Si je peux me permettre, prends donc un homme, cela m'empêchera de le charmer pour parvenir jusqu'à toi."

Elle était délicieuse de cruauté, mettant à la porte cette pauvre fille qui avait eu le tort de croire en mes sourires charmeurs et en mes mensonges concernant Azraëlle. Enfin, homme ou femme, peu importe, si j'avais envie de la voir, je la verrais, même si elle mettait tout une armada de gros muscles devant sa porte. C'était ainsi.

Je lui demandais alors ce qu'elle avait dit à Ciel, sans autre forme de procès, entrant directement dans la vif du sujet. A quoi bon tourner autour du pot et jouer? Elle savait pertinemment pourquoi j'étais ici. Je ne m'en cachais même pas. Son regard m'effleura, me donnant des envies de violence, de meurtre... ou de la posséder sauvagement sur le bureau. Au choix.

- "Des réponses... Bien sûr, tout le monde sait que tu es un modèle de sincérité et d'honnêteté... Je t'en prie, Azraëlle, je sais avec quelle facilité tu manies la vérité et le mensonge."

Mais elle avait raison, de cacher des choses à Ciel lui facilitait la tâche. malheureusement, je ne pouvais guère y remédier. Je ne pouvais pas TOUT dire à Ciel. Je pouvais cependant lui en livrer assez pour récupérer sa confiance. Je distinguais un éclat vipérin dans son regard qui me fit me tendre. Je sentais venir le coup fourré. Et cela ne manqua pas alors qu'elle m'apprit lui avoir parlé de mon pouvoir.

Cette fois, je fondis sur elle, ma main attrapant sa veste avec violence, avant de l'attirer à moi, ma main commençant à se faire brûlante. Un rictus recourba mes lèvres.

- "Une faute? Mais non, quelle idée, voyons..."

Mon autre main caressa son cou, s'emparant de son menton avec autorité. Le brasier brûlait en moi et au fond de mes yeux.

- "Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de toi? J'hésite... Terriblement..."

Je me décollais du bureau, pivotant autour d'elle, inversant nos position, l'acculant contre le bureau, sans pour autant la lâcher. Un désir impérieux s'empara de moi et je m'emparais alors de ses lèvres avec une douceur trompeuse. J'avais envie de violence avec elle. j'avais envie de la coucher là, et de la prendre sauvagement, d'assouvir cette frustration.

- "Bien sûr."

J'étais ouvertement moqueur. Comme si quoique ce soit venant de moi ou de n'importe qui d'ailleurs, pouvait blesser cette vipère. Un peu de sérieux. Elle ne serait pas si fascinante si elle était si faible. Et je n'aurais pas prit la peine de jouer à ses petits jeux. Sauf que cette fois, elle était allée trop loin. Je perdis ma morgue naturelle pour fondre sur elle, comme un cobra qui mord pour tuer et je l'empoignais violemment, répondant d'une voix faussement douce. Doucement trompeuse. Je ne pensais pas la leurrer. Non, elle savait qu'elle m'avait mis en colère en dévoilant mon pouvoir à Ciel. Cela n'aurait pas été si fâcheux si je n'avais maîtrisé le feu et si ses parents n'étaient pas morts dans un incendie. Je savais déjà ce qu'elle avait pu lui glisser comme idée dans la tête.

- "Je suppose que dans ta recherche de vérité, tu as glissé à Ciel le fait que j'aurais pu... éventuellement, provoquer cet incendie pour m'emparer de son âme alléchante..."

Oui, technique classique pour me faire perdre Ciel, pour que je perde sa confiance, qu'il se retourne contre moi. Mais il ne se tournerait pas vers elle, ça,c 'était une certitude. Seulement, il y avait Wilha et ça, c'était un élément qui penchait dans la balance.

- "Je ne suis pas toi mon ange, je ne tue pas les innocents pour obtenir ce que je convoite."

Mensonges... Je l'avais déjà fait et je le ferais encore. Mais dans ce cas précis, je n'y étais vraiment pour rien. Je devais absolument parler à Ciel, c'était urgent. Essayer de limiter les dégâts causés par cette calamité angélique. Elle me posait un réel problème. J'avais autant envie de l'étrangler que de l'embrasser. Et je cédais à mon envie, lui imposant un baiser impérieux. Je pourrais toujours la tuer après. L'inverse était plus délicat, je n'avais aucune attirance pour les cadavres. Je sentis son corps se tendre vers moi et je souris intérieurement. Combien de temps résisteras-tu ma belle? Combien de temps te leurreras-tu quant à ton contrôle de la situation? Je ricanai à sa tentative de conserver un semblant de domination. Trop tard, tu t'es trahie, ton corps t'a trahi, mais de ton corps ou de ta tête, lequel aura le dessus? Mystère et je suis prêt à tenter le diable.

- "C'est moi qui vais t'abattre mon ange... Et tu y prendras même plaisir."

Je souris, cessant de la maintenir alors que mes mains glissaient sur sa peau et que je l'embrassais de nouveau, avec plus de langueur. Qu'elle me repousse donc... Qu'elle me tue... Ou qu'elle meurt sous mes baisers et mes caresses brûlantes comme l'enfer.

- "Je ne lui ai rien caché. Je ne suis pas responsable de cet incendie. Et je n'aime pas dévoiler tous mes atouts cachés, tu vois."

Cependant, j'avais très vite compris que mon don risquait fort de me nuire quant à sa confiance à mon égard. Je manipulais le feu, ses parents étaient morts dans un incendie, j'étais apparu comme par magie dans cette maison en flammes pour les sauver. Drôle de coïncidence n'est-ce pas? Et vu comment ce petit merdeux interprétait tout de travers... j'avais préféré me montrer prudent. Je n'avais pas prévu qu'une personne bien intentionnée s'empresserait de lui dévoiler mon petit secret.

Je lui assurais alors que je ne tuais pas les innocents pour obtenir ce que je voulais et sa sentence tomba, sans appels. Je mentais. Bien entendu que je mentais. J'étais un démon, certes, mais cela ne faisait pas de moi un parangon de vertu. Je ne m'amusais pas à soigner les petits bobos des mortels par bonté d'âme. Non, si je leur venais en aide c'était pour obtenir quelque chose d'eux. Je ne faisais rien gratuitement, rien sans arrière pensée, rien par charité. Les bons sentiments... Pouah, ce n'étaient que faiblesses écœurantes. Et je méprisais la faiblesse.

J'embrassais cette vipère, avec délectation, avec rage, avec perversion. Son contact me révulsait autant qu'il m'excitait. Voir son visage hautain se tordre de plaisir... Pénétrer sa chair angélique, la souiller... A moins que ce ne soit elle qui me souille. Lequel des deux étaient le plus mauvais? Elle, surement... Elle n'avait pas hésité à s'en prendre à une enfant innocente pour avoir ce qu'elle voulait. Elle était plus amorale que moi. Elle se défendait de me désirer, mais son corps ne mentait pas. Tu seras à moi ma belle, tu jouiras sous mes caresses, je te le garantis. Je gagnerais notre combat, je te tuerais dans l'extase.

Ma langue est avide, mes mains conquérantes. Mais la vipère me repousse en un rire qui déchaine mon désir. Sa main empoigne mes cheveux, mimétisme parfait de ce que je lui ai fais subir et un sourire arrogant retrousse mes lèvres alors qu'elle se défend encore de succomber, croyant mener la danse.

- "Qu'attends-tu donc pour me faire goûter à sa morsure?"

Mes mains caressent son corps. Descendent le long de son dos pour se glisser sous ses fesses. Je la soulève, l'assois sur son bureau, me glissant entre ses jambes. Sois à moi et meurs.

Mes mains se glissent sur ses cuisses fuselées, remontent une jupe sévère. Garder la tête froide, je dois absolument conserver toute mon emprise et mon calme, ne pas me laisser entrainer par l'envie d'elle, trop forte, trop pressente, impérieuse. Je n'étais pas un homme ordinaire. Je n'étais pas un faible dicté par l'appel de la chair. J'aimais les femmes, j'aimais leurs corps, mais cela ne me faisait pas perdre tout sens commun.

Sa main se posa sur mon torse et je sentis son pouvoir filtrer. Pourtant, je ne craignais pas pour ma vie. Non, je savais qu'elle ne permettrait pas que le jeu s'arrête maintenant. Azraëlle était trop joueuse, cela la perdrait. Elle repoussait sans cesse les limites, allant toujours plus loin, risquant davantage de s'égarer en chemin. Et elle allait se perdre.

Elle modela son pouvoir, s'en servit pour créer une arme acérée. Je la laissais faire. Je la laissais ruiner une chemise hors de prix par caprice, par jeu, me prouvant ainsi qu'elle pouvait me tuer d'un claquement de doigts et que je ne pourrais rien y faire. Seulement si je veux ma jolie. La glace devint eau, ruisselant le long de mon torse mis à nu. Très pratique, comment j'allais repartir d'ici sans me faire remarquer hum? Elle voulait que toute sa boite sache qu'elle se tapait un homme dans son bureau? Alors c'était gagné. Un sourire narquois ourla mes lèvres.

- "Tu ne peux pas faire comme tout le monde?"

Je craignais déjà pour le pantalon là. Une chemise passe encore, tout l'ensemble... Mais cela devait beaucoup l'amuser.

- "Je me demande ce qu'en penseront tes employés quand je sortirais de ton bureau à moitié dévêtu..."

Ses lèvres se firent avides et elle m'embrassa avec une férocité que je ne lui connaissais pas. Mais que savais-je d'elle, elle qui ne m'opposait que des masques? Rien du tout, en vérité. Mes mains glissèrent sous son chemisier, se frayant un chemin sous le soutien gorge qui enfermait sa poitrine arrogante. J'avais tellement envie de la posséder que je brûlais de l'intérieur. Je voulais tellement la tuer dans l'extase... Je déboutonnais sa chemise, dégrafais son soutien gorge, m'emparant de sa poitrine, jouant avec de la langue. Pas trop vite, je dansais sur le fil du rasoir...

- "Réponse si prévisible..."

Que je n'avais pas formulé. Je ne parvenais pas à la cerner avec exactitude... C'était une aguicheuse, qui savait exciter le désir des hommes, ça, c'était un fait établi. Mais était-elle encore présente quand il fallait passer à l'acte? Ne se contentait-elle pas de souffler le chaud et le froid, sans jamais se donner totalement? Difficile à dire, je ne pouvais encore avoir de certitudes à ce sujet.

Je m'enivrais de son parfum sulfureux, de sa peau d'opale. J'avais une telle envie de la posséder, de la faire mienne, d'ensuite rire aux éclats alors que je lui arracherais le cœur, dans sa gorge encore frémissante d'extase... La fin était si proche... Mes mains remontaient sa jupe, dévoilaient sa poitrine arrogante et formidable que je baisais avec ardeur. Ses doigts agrippèrent la masse sombre de mes cheveux alors qu'elle me faisait relever la tête d'autorité pour sceller mes lèvres d'un baiser au fer rouge. Elle frémissait sous mes doigts, s'éveillait, volcanique.

Et soudain.

Plus rien.

Ses mains me repoussent et je titube presque, surpris d'être arraché si violemment au plaisir. Je la regarde, alors que ses paroles me frappent de plein fouet. Elle me repousse? Elle ose me repousser? Moi? Jamais encore femme n'avait osé faire cela, n'avait trouvé les ressources pour se défaire de mon emprise. Je la regarde se rhabiller, un peu hébété et surtout douloureusement conscient de mon désir qui ne sera pas apaisé cette fois. Ni de la prendre, ni de la tuer. La colère embrase mon regard l'espace d'une seconde, avant qu'un sourire ne pare mes lèvres, suivi d'un petit ricanement alors que je referme ma veste sur mon torse nu, réajustant ma mise, dissimulant mon intense frustration et mon envie d'embraser ce maudit bureau, d'effacer ce sourire narquois de con visage.

Très bien ma jolie. Échec. Mais la partie n'est pas terminée et ne finira pas avant que je te mette et mat.

- "Je dois te reconnaître un certain contrôle Azraëlle. Mais je commence à me demander si sous ces attitudes aguicheuses, ne se cache pas une demoiselle terrifiée à l'idée de succomber."

Parce qu'elle ne faisait que me chauffer, avant de me refroidir aussi sec. Soit elle s'amusait réellement de m'infliger pareils tourments, testant mes limites, soit elle ne se contrôlait que pour se sauver elle-même. Quitte ou double. Je me passais une main dans les cheveux, avant de lui envoyer un baiser du bout des lèvres.

- "A bientôt mon ange."

Je sortis de son bureau, frustré comme jamais, même si rien ne le trahissais, me contentant de jeter des regards lourds de sous entendus aux employés médusés de découvrir que je repartais sans chemise. Qu'ils pensent ce qu'ils voulaient.