Une plume tombée au sol | Iago

C'était presque trop facile...

J'avais eu un coup de chance absolument phénoménal et je n'avais pas hésité à me servir de cette carte pour prendre la demoiselle par surprise. Avait-elle tenté une approche sur Wilha ou bien n'était-ce qu'un fabuleux hasard? Je n'en avais aucune idée. Même si j'avais pensé à une technique d'approche de sa part quand cet homme avait abordé Wilha en lui disant combien elle était ravissante et qu'une si jolie petite fille pouvait aller loin à la télévision ou dans les magazines. C'est là que j'avais débarqué, protecteur à outrance, sans doute, prenant Wilha par la main avant de toiser l'importun d'un regard à geler l'enfer. Et ma voix n'avait pas été plus chaleureuse alors que je le menaçais de porter plainte pour harcèlement sur une mineure. Il avait bredouillé des excuses, avouant qu'il travaillait pour une agence de mannequins (de tout âge), de casting, et qu'il avait été attiré par le formidable potentiel de Wilha. Il m'avait remis sa carte, que j'avais bien failli jeter, avant de me raviser, intrigué. Ou mu par un sixième sens...

J'avais tapé le nom de la directrice de l'agence sur internet et là... Bingo. C'était bien l'ange qui s'intéressait de trop près à la famille Arlington. Elle était aussi délicieuse en tailleur et chignon strict qu'en femme fatale. Et terriblement excitante... Cet homme pathétique avait-il été envoyé par elle dans le but d'attirer Wilha dans ses filets? C'était une question qui méritait d'être posée. Cela me ferait une excellente occasion de revoir la demoiselle. Et de la prendre par surprise également.

Trouver son adresse fut un jeu d'enfants. Bénie soit la technologie!

Entrer chez elle ne fut pas davantage difficile. Et je me fis un plaisir de prendre mes aises alors que j'entendais l'eau couler... Parfait. Elle était sous sa douche. Seule ou accompagnée, je m'en fichais pas mal. Nonchalamment allongé sur le lit, un coude sur le matelas, j'observais sa chambre, après avoir inspecté son appartement rapidement. Non, elle devait être seule. Et là... Quand l'eau cessa de couler et qu'elle se dirigea vers sa chambre... Mon regard remonta de ses pieds nus à son visage, en passant par son corps magnifique, dévoilé en toute impudeur. Elle ne s'offusqua pas, ou du moins, se contint et j'accueillis son commentaire d'un sourire.

- "Je l'apprécie. Comme tout ce qui se trouve dans cette pièce d'ailleurs."

Oui, j'appréciais la vue qu'elle m'offrait. Et mon léger sourire en coin l'indiquait clairement, même si mon regard était désormais rivé au sien.

- "J'espère que je ne te dérange pas... Une femme d'affaires comme toi, si occupée..."

Ma voix était clairement cynique, mon ton ironique, alors que je dévoilais doucement mes cartes. J'en savais davantage sur elle maintenant. Connaître son nom terrestre était utile.

- "Cependant, je suis déçu. Je pensais qu'une femme telle que toi emploierait des larbins moins idiots... Clara."

Ce n'était surement pas son vrai nom, mais qu'importe, je connaissais son identité dans cette vie là, ce qu'elle n'avait pas voulu me révéler la dernière fois. Je l'avais prise par surprise, m'invitant chez elle. Elle ne l'avait pas prévu. Mais j'étais impatient de la voir rebondir.

- "Je sais."

Aimable, je l'étais. Quoique poli aurait été plus approprié. Je sortais rarement de mes gonds et les mots orduriers ne franchissaient jamais la barrière de mes lèvres. Elle en avait eu un aperçu la dernière fois. Elle avait eu beau me rabaisser et m'insulter, je n'étais pas entré dans son jeu. Et là encore, je restais courtois. Je le serais, jusqu'à la fin, même en la tuant. Je haussais un sourcil amusé alors qu'elle me rétorquait que j'avais apprit à me servir de mon cerveau.

- "Tu as une sacrée image des hommes ma jolie... Juste des pervers libidineux qui ont le cerveau au niveau de l'entrejambe..."

Déjà la dernière fois, elle m'avait tenu un discours de ce genre : aguichez un homme avec un corps sublime et une attitude allumeuse et c'était gagné. Très réducteur, même si ce n'était pas entièrement faux. Mais il me fallait plus qu'une belle paire de seins pour que je cesse de réflechir. Même en ce moment, alors que je contemplais la perfection faite femme, je demeurais stoïque. Je lui parlai alors de ses larbins et crus déceler de la surprise dans son regard d'eau. Fruit de mon imagination? Habile comédienne? Réelle marque d'étonnement? Impossible à savoir.

Elle alla s'installer plus loin, me tournant le dos et m'offrant la vue splendide de sa chute de reins et de ses fesses. Cela, plus qu'avant, réussit à m'émouvoir. Je fermai un instant les yeux pour chasser des pensées qui n'avaient pas lieu d'être et reprendre mes esprits, les rouvrant avant qu'elle ne se retourne. Elle m'avoua ne pas comprendre mon allusion et je haussais une épaule :

- "Vraiment? Pourtant, c'est l'un d'eux qui m'a fort aimablement conduit jusqu'à toi."

Je lui laissais le plaisir de se torturer les méninges pour savoir comment. Cela l'occuperait. A moins qu'elle s'en contrefiche finalement. Mais j'en doutais. Je fronçai les sourcils en la voyant actionner un mécanisme et dévoiler ainsi un vase en cristal où brillait une flamme. Je fus bientôt assailli par l'odeur... Une odeur qui me ramena des siècles... des millénaires même, dans le passé. Vestige d'une époque très lointaine où elle était humaine? Ou simple folle envie de sa part?

- "Tu sais qu'il existe des diffuseurs de parfum aussi efficaces, plus modernes et moins... ostentatoires?"

Toujours cette note amusée dans ma voix. Avec peut-être, l'espoir qu'elle se dévoilerait davantage et me conforterait dans mon idée, m'indiquant, en partie, son âge... et sa puissance. Elle s'installa sur un divan, absolument pas gênée par sa nudité. J'aurais été déçu du contraire, je devais bien l'avouer. Je me redressai, retirant ma veste, pour ne rester qu'en chemise et gilet sans manche, assortie à mon pantalon. Un costume sur mesure, cher et élégant, différent de ma tenue décontractée de l'autre fois. Une ombre de barbe apparaissait sur mon visage.

- "Une broutille? C'était pour le plaisir de profiter de ta compagnie, ailleurs que dans un bar bondé, sous les regards des badauds. Ou de Gordon."

Son pathétique humain, sa pitoyable proie... Qui venait de lui filer entre les doigts. Jamais il ne serait béni, jamais il ne serait un ange. Son âme était désormais hors d'atteinte, perdue dans les limbes. Je m'en étais occupé personnellement.

- "En effet... Je ne sais pas quelle est ton histoire avec la gente masculine, mais pour que tu ai si piètre opinion d'eux, tu n'as du tomber que sur la lie."

Je l'observais un instant, avant de répondre, une étincelle rieuse dansant dans les ténèbres de mon regard :

- "Si belle... Si désirable. Sachant jouer de ses charmes à la perfection et dédaignant les hommes qui y succombent... Ai-je tort?"

C'était tout à fait le profil. Absolument superbe, jouant avec ses charmes comme une virtuose, mais méprisant la faiblesse de ceux qui s'y laissaient prendre. Peu avaient du lui résister d'ailleurs. Eu aurais-je été incapable? Probablement pas. J'aimais trop les femmes pour cela et si elle avait décidé de déballer le grand jeu et que j'aurais ignoré tout d'elle, de sa perversion et de sa nature, peut-être m'y serais-je laissé prendre... Si j'avais été un pauvre mortel. Et je me mis à rire doucement quand elle me demanda si je pensais sincèrement qu'elle s'entourait d'incapables. Je notai au passage, que je n'étais plus traité de chien, caniche, chihuahua et autres petits noms affectueux. Devais-je y voir un signe quelconque d'une évolution de son opinion à mon égard? Ou bien avais-je déteint sur elle avec "ma jolie"?

- "Probablement pas... Je n'ai pas dit qu'il était incapable. Juste idiot. Et facilement impressionnable. Mais cela arrive à tout le monde d'être... négligeant."

J'insistais bien sur ce dernier mot, reprenant ses propres termes à mon encontre. Elle l'était également si ses hommes la court circuitaient ainsi. Dire que cela n'était pas jouissif aurait été un sacré mensonge. Je la regardais alors accomplir un... rituel avec son vase. Notant ce détail dans ma mémoire, avant de me moquer de ses manières obsolètes. De mon existence passée, je n'avais conservé que mon amour des chevaux. J'avais été et restais un excellent cavalier.

- "La modernité a ses avantages, ma jolie. Je suis certain que tu préfères la douche chaude à charrier des seaux d'eau pour remplir un baque..."

Avait-elle connu le Moyen-Âge où l'hygiène n'existait pas ou proue? La Renaissance? Ou bien venait-elle de l'Antiquité, avait-elle connu les termes? Cette façon de lancer de la poudre sur la flamme n'était pas sans me rappeler les cérémonies païennes des temps anciens. Mais peut-être allais-je trop vite en conclusions.

Je fis mouche en mentionnant son petit toutou et eus la satisfaction de voir enfin le masque tomber. J'arborais, pour ma part, un air totalement innocent. Et oui, je faisais très bien l'innocent.

- "Pourquoi te mettrais-tu donc en colère? Gordon était là la dernière fois que nous nous sommes vus, nous avons parlé de lui, de ses charmantes qualités, mais son regard insistant sur nous n'était pas propice à une réelle discussion, tu ne trouves pas?"

Je me levais alors, m'approchant de la baie vitrée pour observer la nuit et ses lumières. J'enfouis une main dans ma poche, posant mon autre bras contre la vitre froide, pensif. J'aimais la nuit. Je n'avais jamais craint les ténèbres et je m'y sentais bien. Après tout, n'étais-je pas le prédateur ultime? Qui aurait bien pu m'effrayer? Personne.

- "Qu'attends-tu pour le bénir? Éprouverais-tu des doutes à son sujet maintenant?"

Gordon était devenu un joli petit tas de cendres. Jamais elle ne le retrouverait. C'était ma satisfaction personnelle. Mais c'était aussi une provocation. A laquelle elle risquait de répondre violemment. Ou pire : sournoisement. Elle n'aurait aucune preuve de ma culpabilité, juste la conviction que j'étais derrière cette disparition. Il ne lui en faudrait pas davantage.

- "Et moi, finir par croire que tu ne sais répondre à aucune question."

Parce que je voyais bien ses tentatives de détourner la conversation, ou du moins de l'orienter selon son bon plaisir, en m'empêchant d'en apprendre davantage. C'était de bonne guerre, j'aurais sans doute agi de la même manière.

- "Et je ne m'essaye pas à la flatterie, juste à la vérité, mais je suppose que c'est un concept un peu trop abstrait pour toi."

Oui, j'avouais la trouver très belle et infiniment désirable. En quoi cela était-il une faiblesse? En rien du tout. Comme si elle ignorait l'effet qu'elle pouvait avoir sur les hommes. Que je sois démon n'y changeait rien. On pouvait admirer une œuvre sans en perdre la tête, sans en tomber amoureux. Je ressentais du désir pour elle, c'était vrai. Mais rien de plus et cela ne serait jamais concrétisé. Si elle pensait avoir un quelconque pouvoir sur moi par ce truchement grand bien lui fasse. Je me demandais avec une pointe de masochisme, si je serais capable de résister si elle déployait vraiment tout son talent à tenter de me séduire... Sans doute ne le saurais-je jamais, mais j'étais curieux. Je ne pus réprimer l'envie de titiller sa fierté et souris légèrement quand elle me répliqua qu'elle n'était pas tout le monde.

- "Je ne demande qu'à voir."

Je ne l'étais pas davantage. Cette femme était fière et détestait que quelque chose lui échappe. Je devais exploiter cela pour obtenir ce que je voulais.

- "Insouciants?"

Toujours un pli amusé au coin de mes lèvres. Elle était fine, se contentant de rester vague et de ne rien m'apporter de concret. Tant mieux, il me fallait un peu de fil à retordre, même si c'était frustrant d'une certaine manière. Mon regard se portait sur Londres endormie, mais fréquemment, j'observais l'ange dans le reflet de la vitre. Pas par peur qu'elle m'attaque, je ne la pensais pas si expéditive et suicidaire. Je m'attendais à davantage de rouerie de sa part. Mais parce qu'il était agréable de la regarder. Et que je guettais ses réactions sans qu'elle me voit la scruter. Surtout quand j'évoquais son Gordon. L'incertitude dansait sur son joli visage... Pourquoi en parlais-je? Que lui était-il arrivé? Oserait-elle seulement poser la question ou se draperait-elle dans sa fierté?

- "Moi? Charitable?"

Un rire ponctua ma réponse, et je fis demi tour, m'adossant à la vitre et croisant mes bras sur ma poitrine.

- "Non. C'est amusant, je ne me souviens pas qu'on m'ait jamais qualifié de charitable... Sérieusement, loin de moi l'idée de sauver cet imbécile. Je ne suis pas un Saint Bernard."

L'allusion au chien n'était bien sûr pas anodine, étant donné tous les charmants épithètes canins dont elle m'avait affublé. Je disais la plus stricte vérité : je n'avais pas cherché à le sauver. Juste à la contrarier. Énorme différence. Et ma réponse n'en paraissait donc que plus sincère. Et crédible. Je quittais ma position pour approcher d'elle, ma main osant se poser sur sa peau nue, chaude, douce.

- "Détends-toi chérie."

Mon index caressa la peau de ses épaules, alors que mon regard s'assombrissait encore, si cela était possible.

« Ne te décevrais je pas en y répondant franchement ? Allons, Trésor, tu sais aussi bien que moi que jamais tu n’auras de réponse franche de ma part…Ah si, en voilà une. »

Rectifiais je avec un sourire presque enfantin sur les lèvres, ma main dansa un instant dans l’air a sa petite pique pitoyable. La vérité était une notion abstraite, quoiqu’il en dise. Et je ne perdit pas de temps a lui répondre, dégageant ces mots d’un geste de la main élégant. Il avouait ce que des milliers d’homme avaient avoué avant. Bien qu’il y avait un je ne sais quoi de presque jouissif dût sans doute a sa race impie. Mais la prudence était de mise, n’utilisait il pas la flatterie pour parvenir a ses fins ? Aussi décidais je de ne pas y prêter attention.

« Ne sois pas trop pressé. »

Il me provoquait, je le savais et une partie de moi y répondait sans même le vouloir. C’était terriblement agaçant pour moi. J’observais son mince sourire, comme si j’avais raconté une bonne blague et je me demandais un instant quelle était la nature de ses pensées….Surement détestable, comme son parfum, tentais je me convaincre.

Et puis ce sujet offensant pour moi, Gordon. Juste un homme parmi tant d’autre mais lui avait la grâce d’être mien. Peut être en révélais je trop ou peut être pas d’ailleurs, mais je ne pouvais m’empêcher de darder un regard vicieusement glacial sur le démon. Qu’avait il fait ? C’était une question qui me taraudait. Aurait il osé interférer dans mes affaires ? A cette pensée une flamme destructrice s’alluma dans le jade de mes iris et même son doigt, sa main sur moi ne me fit pas réagir, dans un premier temps. Sans doute parce que je ne le pensais pas capable de me toucher sans en vomir…mais lorsque je m’en rendit compte, je bifurquais mes yeux sur sa main, résistant a l’envie démentielle de le repousser pour échapper a son contact trop dérangeant.

« Tu a osé me contrarier n’est ce pas Trésor…Cela se lit sur ton visage. »

Ronronnais je doucement alors qu’une étincelle meurtrière s’étendait a mon regard. Souple, ondulante, j’approchais mon visage du sien, comme une amoureuse languissante, comme une amante en quête d’un baiser.

« Venir chez moi sous un prétexte aussi idiot que ton maitre…Me provoquer alors même que tu n’es pas en terrain conquis, alors même qu’il te manque les cartes maitresses, penses tu que tout cela sois prudent ? »

Mon souffle mourrait sur ses lèvres, comme un prémices, une sensation chaleureuse, indécente mais je ne commettrais pas l’erreur de céder.

Je ne répondis pas. Elle avait raison. J'aurais effectivement été déçu qu'elle se comporte autrement. Peut-être étais-je en train de l'idéaliser, de la penser plus maligne et perfide qu'elle n'était mais mon instinct me soufflait qu'elle était effectivement telle que je l'imaginais. Voire pire. Je n'avais que rencontré peu d'adversaires dignes de moi. Mon âge, assez rare chez les anges ou les démons, y jouait énormément.

- "Tu ne peux me reprocher d'être impatient de constater à quel point tu sors du lot ma jolie."

Vas-y, montre moi dont de quoi tu es capable. Tu attaques, tu aboies, mais tu ne mords guère pour le moment. Montre moi ce que tu as dans le ventre. Et je m'amusais avec elle, la laissant se demander ce que ses mignons avaient bien pu faire pour que je remonte jusqu'à elle. Et puis, j'abordais le sujet de Gordon. Un homme qu'elle méprisait mais avec qui elle s'amusait. Et puis, il était à elle. Cela ne se faisait pas de prendre la proie d'une autre n'est-ce pas? Et je jubilais de voir son regard se troubler de rage contenue. Non, elle n'était pas insensible sur ce sujet et ne parvenait plus à cacher la colère que je suscitais en elle en parlant de Gordon. De feu Gordon. Je l'approchai, la caressant doucement. Elle ne songea pas à se soustraire à mon contact, même si son regard fut finalement éloquent.

- "Te contrarier? Comment pourrais-je te contrarier?"

Je jouais parfaitement bien l'innocence à ce moment là.

- "Je n'ai jamais dit que je venais pour Ciel mon ange."

Elle s'était approchée de moi, et mon regard fut irrésistiblement attiré par ses lèvres, terriblement invitantes. Quel goût pouvaient-elles bien avoir? Et comment réagirait-elle si je m'en emparait, de force? Voilà une question qui méritait réponse, mais oserais-je seulement aller aussi loin avec elle?

- "Tu vois de la provocation où il n'y a qu'une visite de courtoisie ma belle."

J'approchai mon visage à mon tour, avant que ma main ne se saisisse de ses cheveux, à la base de sa nuque, avec rapidité et fermeté, mais sans brutalité. Je respirai son parfum, mes lèvres frôlant les siennes, mais je ne l'embrassai pas, non, c'était trop tôt, autant jouer encore un peu.

Ah quel délice de voir la colère agiter l'eau de son regard troublant. Je la sentais presque crépiter. Mais elle ne se laissa pourtant pas submerger par cette mauvaise conseillère et je lui tirais mon chapeau pour cela, tout en approuvant une telle attitude. Je la testais, je me faisais petit à petit une idée de mon adversaire. Et quelle adversaire!

- "Non, désolé de te décevoir."

Oui, je la craignais. Parce qu'elle était un caméléon et qu'elle pouvait tout à fait attirer Ciel dans ses filets à force de mensonges. Même si ce gamin était intelligent et difficile, il restait un gosse. Et il y avait bien des façons d'embobiner un enfant. Je m'étais approché d'elle, la caressant, avant de la saisir par la nuque, plongeant mon regard dans le sien. Je serrais, sans pour autant la broyer. Je ne cherchais ni à la blesser, ni à la menacer au final. Je n'avais rien à gagner à une épreuve de force. Je ne lui avouais pas pourquoi j'étais là et son index se posa sur mes lèvres, me faisant frémir malgré moi, de même que sa voix caressante. Trop près, j'étais trop près, mais je devais assumer jusqu'au bout. Sa main glissa sur ma joue et elle me demanda la vérité. Je souris, m'emparant de sa main, la baisant ensuite avec galanterie, sans la lâcher du regard.

- "Tu veux la vérité?"

Ma main enserrait sa nuque, l'autre tenait sa main. Je l'embrassai alors. Subitement, sans qu'elle ai le temps de réagir ou de se débattre. j'embrassai l'abomination et j'y pris plaisir, malgré moi. Ses lèvres étaient trop attirantes pour que j'y résiste. Mais toute bonne chose avait une fin et je devais la laisser sur sa faim, justement. Je cessai, tout aussi brutalement. Je me détachais d'elle avec rapidité, me dirigeant vers la sortie à grandes enjambées, me retournant pourtant une dernière fois :

- "A bientôt mon ange. Je ne doute pas que tu sauras répondre à ta question seule."

Je lui envoyai un baiser moqueur, avant de tourner les talons et de la laisser seule dans son appartement, à réflechir à notre petit jeu. Pour ma part, j'avais besoin d'air. J'avais trop joué avec le feu et même démon, je restais un homme, aux envies et aux désirs impérieux.