Remember [Pv Erika]

Je ne répondis pas. Que répondre à cela d'ailleurs? Pourrais-je provoquer la destruction de Gabriel? Moi, la petite démone de même pas trois décennies, avais-je le pouvoir de détruire l'archange de presque trois millénaires? Non, je ne pensais pas avoir cette force, ce pouvoir, même si c'était grisant. Combien de fois avais-je rêvé de le séduire, de le voir offert, sur un lit, pour lui enfoncer un poignard dans la poitrine et en arracher le cœur? Beaucoup trop, mais cela n'était que fantasme et je doutais d'avoir le cran nécessaire pour préméditer ainsi un meurtre. Surtout le meurtre d'un homme que j'avais aimé. Que j'aimais toujours. Même s'il ne me méritait pas, même si c'était un cavaleur, un assassin, et un menteur.

Son histoire personnelle m'avait touchée. Je cherchais son regard alors qu'il le dérobait à mes yeux. Empoignant son menton pour confronter nos regards. Il sourit quand je lui affirmais ne pas être un ange. Je n'étais pas faite pour la destruction, ce n'était pas mon destin et pas ce à quoi j'aspirais, contrairement à lui. Il avait failli me détruire, il y était même parvenu, selon un certain point de vue. Pouvais-je lui rendre la monnaie de sa pièce? Le faire souffrir au centuple? Lui rendre ses coups?

J'eus alors une idée et je le lâchais pour aller chercher son collier d'esclave. Sans faiblir, je le lui passais autour du cou. Ce qui ne lui plut pas. J'avais compté sur cette réaction épidermique de sa part. Concernant son humanité, au moins, il ne semblait pas capable de mentir. Il pouvait ressentir des émotions violentes et ne pas savoir les dissimuler. Intéressant. Ton humanité était-elle ton talon d'Achille mon amour? Implacable, je lui demandai s'il supporterait collier et chaîne. L'humiliation.

Il se leva brusquement, le regard tourmenté. Agité par des sentiments violents. Je restais face à lui, sans bouger, alors qu'il ôtait le collier et le jetait. Non, il n'aimait pas cela et ne l'acceptait pas.

- "Reviens-tu sur ta parole?"

Il l'avait dit : il était à moi pour le mois à venir et prêt à faire tout ce que je voulais. Refuser cela revenait à trahir sa promesse. n'avait-il donc aucune parole? C'était sans doute cruel de le forcer à se souvenir de sa servitude, à me servir de ça... Mais nécessaire. Il s'avança vers moi et je retins un mouvement de recul, tenant bon face à lui alors qu'il s'apaisait. Avouant qu'il le méritait. Je répondis froidement :

- "Je trouve aussi."

Il posa alors son front contre le mien, si proche. Ma raison vacilla. Mes résolutions s'effondrèrent. Il me troublait trop, réflechir et garder la tête froide quand il me touchait m'était impossible. Comme je le haïssais d'avoir ce pouvoir là sur moi! Il m'embrassa le front et mon cœur palpita. Trop tôt, il s'éloigna de moi, me laissant démunie. Son aveu me fit fondre, mais je fis semblant de ne pas être touchée.

- "Tu as raison d'avoir peur."

Moi, je m'ouvrais trop facilement aux autres et j'en avais souffert terriblement. Lui, il n'aimait que lui et ne laissait personne l'approcher. Il était seul et ne souffrait pas de la trahison. Personne n'avait d''emprise sur lui. Finalement, qui avait raison? Quel était le meilleur comportement à adopter? Je me rapprochai de lui, ma main se posant sur son cœur qui battait régulièrement.

- "Parfois, je me dis que je ferais mieux d'apprendre à ne plus rien ressentir. A enfermer mon cœur à double tour et à devenir comme toi, exempte de tout sentiment qui rend faible."

Je marquai une pause, avant de sourire en coin :

- "Mais devenir comme toi serait mourir."

Je n'aurais alors plus aucune valeur, plus aucun sens moral. Ce ne serait plus moi et il aurait gagné.

Elle me piégea durant quelques secondes. Le temps de me demander si je revenais sur mal parole. Putain de passé qui me faisait faire des erreurs. Je devais redevenir calme et lui porter le coup de grâce. Ce qui allait la faire tomber pouvait me faire tomber moi aussi. Et de très haut. Je devais souffler et remettre de l'ordre dans mes pensées. Alors, sans la regarder. Je lui répondais. Aussi calmement que possible.

— Non.

M'avançant vers elle, je lui avoua que je le méritais. J'avais déjà trop payer durant mon humanité. Je ne pouvais plus être puni. Je n'avais pas vécu durant vingt ans, j'avais le droit de reprendre ce qu'on m'avais volé. Certes, c'était 2500 ans de reprise de pouvoir, mais si je me sentais toujours aussi frustré en pensant à mon humanité, cela voulait dire que 2500 ans n'était pas assez. Non, j'avais besoin de récupérer, encore.

Je l'a senti tendu lorsque je m'approchais d'elle. Je lui faisais bien plus d'effet qu'elle ne voulait se l'avouer. Elle m'était dépendante. Alors, sa remarque me fit sourire. Mais ça elle ne le vit pas. J'avais mon front contre le sien. Patient, je lui offrais quelques minutes de répits contre moi. La laissant s'habituer, laissant son corps s'emballer face à ce que je lui provoquais. Et puis je lui embrassais le front, finissant par la quitter, imposant une distance de sécurité. Je savais que son coeur me pleuré déjà. Il me voulait il me désirait. Alors je lui avouais avoir peur des sentiments qui m'habitait. Et elle se cru forte de me dire que j'avais raison de les craindre.

Parfait. Doucement, elle se laissait prendre au piège. Doucement elle m'offrait son âme. Elle s'approcha de moi avant de poser une main sur mon coeur. Sentant le battement régulier de se dernier. Non, je n'étais pas aussi fragile que toi. Je résistais contrairement à toi. Elle m'avoua qu'elle pensait souvent à m'imiter. Enfermer tous sentiments inutiles. Tout ce qui rendait faible. Mais il fallait le faire lorsque nous étions vivant pour réussir. Chose que tu n'avais guère fait mon amour.

Souriant alors, elle conclut par le fait qu'être comme moi revenait à mourir. Oui plus ou moins. Si l'on considérait que les sentiments humains était un poids, si l'on considérait que tous ce qui nous rendait humain nous rendait faible et qu'en oublié l'existence nous tué... Oui, cela revenait à mourir... Mourir sous les plaisirs les plus impures.

— Ce n'est pas un don d'être froid et distant, c'est une malédiction.

Je refermais alors ma main sur la sienne. Sentant au travers les battements régulier de mon coeur.

— Car au moindre relâchement ... On sombre dans l'inconnue, dans des émotions si étrangères qu'elles vous tuent réellement.

Lâchant sa mains, je ne me détachais pas de son contacte.

— Fait de moi ce que tu veux...

Il avait promis, n'est-ce pas? Il avait promis de faire ce que je voulais, même si cela devait l'humilier. J'en jouais, lui demandant s'il revenait sur sa parole. Il hésita... c'était imperceptible, mais il réfléchissait et il finit par me répondre que non, il ne revenait pas sur sa parole. Vraiment? Il s'approcha de moi alors, m'avouant avoir mérité que je le traite de façon humiliante après ce qu'il m'avait fait subir. Ça, c'était un euphémisme. Mais il avait trop d'emprise sur moi et je perdais de mes envies de méchanceté alors que j'étais collée contre lui, son front contre le mien, mon corps épousant le sien. J'avais tellement envie de lui que j'aurais pu en hurler de frustration de m'imposer cette torture. Torture nécessaire cependant. Je n'étais pas une proie facile, je ne voulais plus l'être, plus jamais. Qu'il aille donc au diable! Ou à Dieu plutôt.

Ce qu'il fit en me lâchant, me laissant seule et fragile. J'avais froid sans lui. j'avais mal sans lui. Va-t-en! Laisse-moi... Reviens! Sers-moi... je ne savais plus, mon cœur me trahissait, mes sentiments, perfides émotions qui m'empêchaient de réflechir m'handicapaient. Je me rapprochaient, posant une main sur son cœur, calme, régulier, quand le mien s'affolait. S'il m'aimait comme il le disait, s'il me désirait, celui-ci ne devrait-il pas tambouriné? Ne devrais-je pas le sentir palpiter sous mes doigts? Ce cœur froid que je saisirais un jour de sa poitrine béante? Ce cœur qui me revenait de droit...

Il emprisonna ma main dans la sienne, disant que ce n'était pas un don, mais une malédiction. Je levais le regard vers lui.

- "Si ton âme était si froide et distante, tu n'aurais pas à craindre de plonger dans l'inconnu."

Je souris doucement.

- "Peut-être essaies-tu de te convaincre du contraire, mais ton humanité n'est pas morte... Tu l'as brimée, enfermée, pour ne plus jamais ressentir, mais tu le dis toi-même : au moindre relâchement, tu seras vulnérable."

Et quand ce jour arriverait, je serais là, à contempler la déchéance de la main de dieu qui me suppliera de ne pas partir. Oh, c'était un rêve que j'avais fait tant de fois, un rêve de vengeance, parfait, si on exceptait le fait que je ne serais sans doute pas capable de lui faire autant de mal... C'était pathétique. Pitoyable. Désolant. Il me lâcha la main, me disant alors de faire de lui ce que je voulais. Je souris alors, conservant ma main sur sa poitrine et le faisant reculer jusqu'au lit où je le fis asseoir.

- "Tu sais pertinemment ce que je veux de toi. Je n'essaierais même pas de le nier."

Je lui attrapais le cou et me penchais vers lui, lui assurant une vue plongeante sur mon décolleté mais ne le lâchant pas des yeux :

- "Comment peux-tu susciter autant d'émotions contradictoires en moi? Comment est-ce que je peux avoir autant envie de te sentir gémir sous mes doigts, de frémir sous tes caresses et de t'arracher le cœur et de le piétiner, en juste châtiment de tes crimes?"

Ma main agrippa ses cheveux, le faisant lever la tête sans aucune douceur, alors que je caressais sa mâchoire de l'autre, sensuelle, joueuse.

- "Prends garde Gabriel... Je suis peut-être totalement folle de toi, mais je ne me laisserais pas humilier une seconde fois. Ne joue pas avec moi... Ne me manipule pas. Ou tu le regretteras."

Menaces dérisoires dans ma voix. Cela devait le faire rire intérieurement s'il se fichait de moi. Comment moi, une petite démone novice, pouvais-je bien le punir de se jouer de moi? Mystère... J'avais plus d'un tour dans mon sac. Je pouvais le piéger, réellement. Le rendre dépendant de moi, lui apprendre à aimer quelqu'un d'autre que lui-même. Et s'il se retournait contre moi... Non, plus jamais l'humiliation, même si le tuer signerait mon propre arrêt de mort. Je lui lâchais la nuque, le poussant à s'allonger sur le lit, avant de poser un genou sur le matelas et de ramper vers lui.

- "As-tu envie de moi Gabriel? As-tu au moins été sincère avec moi quand tu me désirais?"

Lui révéler des failles, la laisser croire en des songes. Elle en tirait des conclusions, pensant tenir la une arme contre moi. Mais si je t'ai dit qu'une humanité me tuerait, crois-tu vraiment avoir une chance de m'abattre ? Crois-tu avoir la force de m'abattre avec ? Non, tu n'en seras pas capable et ce, tant que tu m'aimerais. Tant que tu seras persuadé au fond de ton coeur de mon amours pour toi. Mon humanité n'est pas morte selon toi ? Voyons, Erika ... Cela faisait des millénaires que je n'avais plus ressentis la moindre émotion humaine. Oh bien sur, je savais les imiter à la perfection. Je savais en jouer comme personne.

Pas étonnant que je sois enseignant dans cette noble matière qu'est la manipulation. Vivre dans le faux, et faire croire aux autres que cette réalité n'est pas un songe ... Mais ... Ne serais-ce pas Erika ma dernière victime à s'être laissé prendre dans mes filets ? Cruelle comédie n'est-ce pas ? Je n'avais rien enfermée, j'étais mort depuis longtemps et je me haissais d'avoir vécu. Oui, j'avais tué mon humanité si pitoyable qu'elle ne mériterait aucune histoire. Alors non, sache que je ne me relâcherais jamais. Ma chute n'était pas pour aujourd'hui. Désolé Erika, tu allais devoir attendre.

Je lui affirmais qu'elle pouvait faire ce qu'elle voulait de moi. Elle sourit alors, laissant sa main sur mon torse avant de me faire reculer, puis m'asseoir sur le lit. Elle me dit alors que je savais pertinemment ce qu'elle voulait de moi. Oui Erika je savais, tu le hurlais depuis le début de notre rencontre. Même un sourd et un aveugle l'aurais compris.

Elle m'attrapa alors le cou, m'offrant une vue plus qu'agréable de son décolleté. Pourtant je relevais les yeux vers elle. Calme et stoïque. Elle me demanda alors comment je pouvais susciter autant d'émotion en elle. Comment je pouvais la faire m'aimer et m'haïr en même temps. C'était simple, si je te faisais ressentir autant de chose c'est que j'étais le maître de ton esprit et de ton coeur. Tu étais mienne depuis longtemps. Et ça, tu luttais contre avec une détermination égale à celle d'un étudiant un jour de grand soleil.

— Peut-être parce que je suis prit entre ces même feux Erika.

Agrippant alors mes cheveux dans un acte de violence non dissimulé. Tu me releva la tête, caressant ma mâchoire du bout des doigts. Tu étais fichu ma belle. Ce que tu disais n'avait aucun sens. Comme tes gestes. C'était perdu d'avance mon amours. Comment veux-tu que je prenne garde alors que tu avoues toi-même être folle de moi. Comment sembler crédible lorsque tu me dis de ne pas jouer, ni te manipuler. Mais Erika, c'est déjà le cas ... Dommage que tu ne le comprennes pas !

— Erika, je suis souvent impatient ... Crois tu que je me donnerais à toi aussi longtemps ? Ce n'est pas un jeu Erika ...

Me poussant alors sur le lit, tu finis par m'y rejoindre. Te déplaçant avec sensualité vers moi. Me demandant alors si je te désirais, si j'avais été sincère avec toi. Pourquoi es-tu si facile à piéger Erika ? Pourquoi es-tu si naïve ? Cela en devient trop facile, beaucoup trop.

— Erika ... Ne me crois pas si stupide. Je ne nierais pas mon envie de toi, mais je sais pertinemment que tu joues en ce moment même. Je te désire, mais je ne me fais aucune illusions ...

Me redressant légèrement, je te fixais dans les yeux d'un regard tendre. Tendresse mimé, bien évidemment.

— Tu n'as cessé d'habiter mes pensées depuis que je te connais Erika ... Et cela ne cessera pas.

Etait-ce donc si stupide de vouloir être aimée à ma juste valeur par l'homme qui m'obsédait? oui, sans doute, surtout quand cet homme était un Séraphin deux fois millénaire qui s'appelait Gabriel et était connu pour séduire ses futures bénies, avant de les abandonner. Maintes et maintes fois, Freddie m'avait mis en garde et pourtant, alors qu'il me faisait miroiter un avenir tous les deux, un amour de sa part pour moi, une blessure profonde que je lui aurais infligé et qu'il aurait cherché à fuir, je ne pouvais m'empêcher d'espérer, espérer que Freddie se trompe, espérer être celle qui réussirait à faire fondre ce coeur de glace à se faire aimer de cet homme pour ensuite pouvoir lui rendre la monnaie de sa pièce.

Encore eut-il fallu qu'il m'aime réellement, même si ses discours et ses attitudes ne semblaient pas mentir... Encore aurait-il fallu que je sois capable de faire du mal à quelqu'un que j'aime, chose dont je n'étais absolument pas certaine.

Et je jouais de lui, de son désir, du mien alors que je me consumais, je n'arrivais pas à réflechir, je lui posais des questions sans queue ni tête, je m'en rendais bien compte et chaque réponse de sa part était du miel à mes oreilles. J'avais tant envie d'y croire. Et je me sentais si stupide de fondre quand ma raison me hurlait qu'il se foutait de ma gueule, une fois de plus, qu'il était un expert en manipulation, qu'il pouvait avoir n'importe quelle fille d'un sourire et de quelques paroles mensongères.

Avec une force que je ne me connaissais pas, je le lâchai et m'écartai de lui de plusieurs pas, mettant de la distance entre nous. J'avais froid soudainement, loin de sa chaleur, mais je devais me montrer inflexible.

- "Vraiment? C'est ce que nous verrons Gabriel. Un mois pour me prouver que tu m'aimes. Un mois pour me montrer que tu as changé. Un mois pour me convaincre que tout ceci n'est effectivement pas un jeu. Le tien."

Je fus satisfaite de constater que ma voix ne tremblait pas. Je fis demi tour, douloureusement, avant de quitter sa chambre, retournant dans la mienne et m'effondrant soudain, prise de frissons incontrôlables, tant tout ceci me dépassait...

Un mois...

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