Ah oui, c'est vrai... | Jane & Hannah

Age : 34 Messages : 191 Date d'inscription : 22/03/2012

    Les choses s'étaient peu à peu tassées. Au grand plaisir d'Elle, les medias s'étaient rapidement désintéressés de son histoire. S'il était vendeur de couvrir l'assaut en règle par les forces de l'ordre d'un studio étudiant, il l'était beaucoup moins de commenter du vide et c'était bien là ce que la démone laissait aux instances humaines qui désiraient la retrouver. Du vide. Du néant. Elle était devenue comme invisible. Moira Keith traînait parfois dans les rues, mais de moins en moins et pour cause, les choses s'étaient plus ou moins arrangées avec Hannah. Même si s'approcher de la demoiselle n'était pas toujours facile — surveillance oblige — Elle passait désormais le plus clair de son temps dans la demeure familiale. Il n'y avait bien que Hannah pour s'en rendre compte, la scandinave pouvait être un véritable fantôme quand elle le désirait vraiment et elle n'avait donc aucun mal à se déplacer sans se faire remarquer. C'était d'ailleurs un exercice assez amusant.
    Même les attaques surnaturelles se faisaient rares ; la guerre semblait chercher son souffle et manquait de se terminer d'elle-même, bien loin du grandiose de ses premières heures. Il avait suffit à Elle de défendre son territoire pour décourager les intrusions et après trois ou quatre affrontements, on l'avait laissée en paix. Tant mieux ! Sa paix retrouvée, elle pouvait se concentrer sur sa protégée. Et la démone de se demander comment elle pouvait désormais amener la question du lien et présenter ses implications. Comment faire comprendre à Hannah combien elles avaient toutes deux à y gagner ? C'était là toute la question et Elle n'avait pas encore trouvé de réponses satisfaisantes. Pourtant, ce n'était pas la première fois qu'elle se livrait à l'exercice, mais avec Hannah, tout semblait toujours plus compliqué.
    C'était un soir de routine, Elle était rentrée de sa journée relativement tôt par rapport à d'habitude — pendant le repas, très précisément — et l'artiste avait eu la joie de la retrouver sur son lit à son retour, en tailleur et un léger sourire aux lèvres. Après s'être saluée, la démone s'était enfuie quelques minutes histoire de prendre une douche et ensuite, elles avaient discuté. Reprenant leurs habitudes d'avant la mort de Cæso, Elle s'amusait à témoigner sur les grands événements historiques, apportant son éclairage très subjectif sur la question. Cela faisait passer le temps et, sans doute, donnait l'impression à Hannah de vraiment connaître la demoiselle qui partageait désormais son quotidien. Elle n'était plus « la démone », elle était cette femme qui avait eu la chance de rencontrer François Ier de façon très... rapprochée.
    Pour autant, tout ne pouvait pas rester toujours parfait. Elle le savait bien, pour l'avoir de nombreuses fois expérimentées. Aussi, ce soir là, alors qu'elle racontait une anecdote croustillante au sujet d'un poilu qu'elle avait connu pendant la première guerre mondiale, la démone se figea et poussa un juron des plus inappropriés. Elle les avait oubliés, ceux là... « Quelqu'un vient, » expliqua-t-elle devant le regard surpris de Hannah. Quand elle vit l'inquiétude s'allumer dans son regard — la suédoise ne pouvait pas s'empêcher de s'inquiéter dès que l'ombre d'une confrontation se présentait — Elle s'empressa de la rassurer. Il s'agit d'une ange, mais tu n'as pas à t'inquiéter. Elle ne vient pas pour se battre. » La démone aurait préféré, mais elle ne se permit pas de le rajouter, sachant très bien quel regard noir elle récolterait.
    « J'imagine qu'elle vient prendre de mes nouvelles. Son lié... » Elle marqua une pause, se rendant compte que c'était finalement la première fois qu'elle abordait le sujet. Tiens, cette petite contrariété avait finalement du bon. « Son lié s'intéresse à moi. Elle sait que si elle remue le petit doigt, je risque de me fâcher. Ça devrait la convaincre de se tenir à carreau. Le plus simple reste qu'elle vienne à nous, » conclu-t-elle en montra la fenêtre du doigt. Il allait falloir attendre un peu.

Age : 33 Messages : 9 Date d'inscription : 14/06/2012

Depuis quelque temps, Plume devait suivre la démone qui avait tapé dans l’œil de son lié. Elle n’avait aucune idée de ce qu’il lui voulait et n’avait aucun levier pour partir à la pèche aux infos auprès de son humain. C’était plutôt frustrant, il avait le don de la faire tourner en bourrique sans qu’elle ne trouve rien pour répliquer. Peut-être était-ce dut à l’éducation de l’ange qui avait toujours vécu sous la tutelle de quelqu’un, et l’humain était suffisamment têtu pour la tenir en laisse ; quoi qu’il en soit l’ange n’en savait rien et n’était même pas proche de se poser la question.
Ce qu’elle savait par contre c’est que la démone semblait chercher quelqu’un et était plus ou moins obsédée par une humaine, fille de diplomate et peintre à ses heures perdues. Elle aurait d’ailleurs kidnappée celle-ci, d’après les médias, et son ancien appartement avait été pris d’assaut par les forces de l’ordre.
L’heure de l’observation était terminée, l’humain voulait de nouveau avoir une petite conversation avec la démone et Plume était de corvée pour porter son message. Lui avait d’autre projet pour le moment et il était parti Dieu sait où. Cependant, l’ange était assez confiante, il était assez grand pour se débrouiller et elle le sentirait s’il avait besoin d’aide. Ce n’était pas tellement la partie qui la contrariait, c’était plus cette histoire de message. L’ange était peu réjouie de devoir s’approcher si près de la démone à découverts. Elle n’avait pas la moindre idée de comment faire pour éviter de se faire arracher la tête la seconde où elle se dévoilerait, parce que, soyons honnête, c’est quand même plus facile de délivrer un message de ce genre avec la tête sur les épaules, plutôt que sur les genoux.
Ne trouvant pas vraiment de bonne solution pour approcher la démone elle opta finalement pour une exécution un peu plus publique. Elle mettrait l’humaine entre elles, peut-être que ça lui permettrait de garder sa tête, même si son humain lui l’avait clairement perdu.

Assise sur un toit, une sucette dans la bouche l’ange attendait que la démone s’installe et que la luminosité diminue un peu plus. Les ailes blanches c’est jolie et tout mais pas vraiment fait pour être discret et d’ailleurs ce n’était pas toujours la qualité première des anges. Après avoir attendu un temps suffisant, la jeune fille balaya le dragon en origami qu’elle avait sur les genoux et les grues qu’elle avait fait avec les papiers des sucreries qu’elle avait dévorées. L’ange étendit ses ailes, libérant son aura céleste, et s’élança dans les airs. Elle fit un tour de la propriété depuis les airs avant de se poser sur le toit de la maison voisine. Là, Plume attendit un instant observant les aller et venus des rares passants. Se décidant enfin, elle sauta silencieusement au milieu de la propriété du diplomate. Attentive, la jeune céleste se glissa dans la maison à la suite d’un serviteur, avant de calquer son pas à ceux d’un homme qui semblait être le maitre de maison, du moins l’humaine de la démone lui ressemblait un peu, du moins du peu qu’elle pouvait voir de là où elle se trouvait. Dansant silencieusement avec l’humain pour éviter de se faire remarquer, elle le lâcha quand il entra dans un bureau, continuant vers l’endroit où elle savait trouver la chambre d’Hannah et la démone. Toujours aux aguets la jeune ange eut un moment d’hésitation, elle toucha la crosse de son arme dormant sous son épaules, sa veste à demi fermée, s’assura que ses couteaux étaient en place et poussa silencieusement la porte.
Entrant comme si elle avait tous les droits d’être là, elle referma doucement la porte sans quitter les deux jeunes femmes des yeux et sans faire un bruit. Un demi-sourire étirait ses lèvres alors qu’elle détaillait les deux autres.

-Kon’ban’ha*, Hana-tan. Salut la vieille. Alors, comment tu t’appelles maintenant. Je suppose qu’Elle Greece est morte, ajouta-t-elle taquine.

*C'est supposé vouloir dire bonsoir en japonnais si je ne me trompe pas.

Age : 30 Messages : 47 Date d'inscription : 23/04/2012

Les toiles avaient retrouvé des visages. Plus de Elle troublée, vide, morte. Était-ce une bonne chose ? Je n’en savais strictement rien – mais je savais maintenant qu’il était stupide d’éloigner Elle – pardon, Moira – de ma vie. Elle était malheureuse et moi aussi et, bien que je sois rancunière, je ne pouvais pas arrêter de la voir. C’était plus fort que moi – restait à savoir si j’en paierais le prix plus tard. Pour l’instant, tout avait repris son cours normal. Moira vivait pratiquement chez moi. Elle était là lorsque j’arrivais, toujours là quand je m’endormais, et le plus souvent je me réveillais sous son regard doux. À croire qu’elle ne dormait jamais. Je ne savais pas si elle quittait le domicile la nuit, je m’en fichais un peu. Elle faisait ce qu’elle voulait, après tout. L’avantage d’une grande maison, c’était que j’avais mes quartiers – fader aurait fait une crise cardiaque si il avait su que je vivais toujours avec la fille qui avait manqué me faire tuer. Mais bon, elle était morte celle-là, d’une balle à la tête. La nouvelle amie de sa fille, s’il venait à la croiser, ne pourrait tout simplement pas être cette jeune femme à la mauvaise influence. Puis, j’étais exemplaire, ces temps-ci. Pas de sorties, je peignais de nouveau, j’avais de très hautes notes à l’école et j’avais même accepté de prendre le chauffeur personnel de fader, au cas où Elle n’aurait été que le premier membre d’une série de mafieux qui voulait ma peau. Argument stupide de fader, mais je n’avais pas protesté – j’en profitais pour faire une tournée communautaire et embarquer pleins de gens, de sorte que nous n’avions qu’une voiture et non dix. Une limousine, ça a aussi ses avantages, quand on y pense. Une fois la journée finie, je rentrais faire mes devoirs sous le regard attentif de la démone, puis, le plus souvent avec force chocolat, chips ou autres cochonneries de cet acabit, Moira me racontait sa vie, comme avant. Tout avait retrouvé le cours normal de l’existence. Ou presque…J’avais quand même failli mourir, après tout. Je restais un peu nerveuse.

Aussi, quand Moira m’annonça, un soir, que quelqu’un venait et que ce quelqu’un s’avéra être une espèce de blondinette, le seul commentaire qui me vint fut :

« Elle va vouloir me tuer elle aussi, ou je peux rester pour la discussion ? »

Notons que mon sens de l’humour ne s’était pas beaucoup amélioré. Enfin ! J’avais confiance en Moira, une confiance quasiment aveugle – mais je devais avouer qu’à l’occasion, l’envie d’ouvrir les yeux dans le noir était trop forte. Je m’en voulais, mais bon, c’était quand même une démone. Autant rester sur ses gardes. D’ailleurs, la nouvelle venue ne m’inspirait pas vraiment confiance non plus. Trop petite…trop fragile. On avait presque envie de la serrer contre nous, mais quelque chose me disait que cet instinct maternel soudain ne serait pas le bienvenu.

« D’une balle dans la tête, même. »

Comme mort, on ne fait pas mieux. J’étais presque triste qu’elle soit arrivée, j’aurais voulu savoir pourquoi le lié de la demoiselle s’intéressait à Moira. Jalouse ? Un peu. Moira et moi, nous avions partagé beaucoup…il était normal que je désire compter plus que les autres. Quelque chose me disait que c’était déjà le cas, mais bon, je pouvais bien avoir deux ou trois défauts, non ?

« Je suis Hannah » fis-je pour la nouvelle.

Age : 34 Messages : 191 Date d'inscription : 22/03/2012

    « Tu sais très bien que tu ne risques rien avec moi. » L'humour de la jeune humaine n'était pas toujours pour plaire à une Moira qui faisait beaucoup d'effort pour l'aider à surmonter le traumatisme de sa dernière rencontre avec Cæso. « Je te l'ai prouvé, non ? » En tuant une promesse de deux mille ans. Hannah ne se rendait pas compte de ce qui s'était passé ce jour là, en tout cas, elle en doutait fortement.
    Finalement, leur invité ne leur fit pas l'honneur de s'introduire par effraction dans la maison par la fenêtre, comme l'avait pensé d'abord Moira, mais par la porte. Il y avait une certaine forme de panache à cela et la démone la salua avec bonne humeur : « Je vous avais presque oublié, dis donc. Tu fais bien de te montrer. » La réponse devait lui arracher une moue dubitative.
    La vieille, vraiment ? Moira décrocha un regard mi-figue mi-raisin à la Plume ; certes, elle était âgée et pas qu'un peu, mais tout de même, elle n'était pas certaine que le qualificatif fut véritablement approprié. Mais d'un autre côté, elle parlait à un ange, elle ne pouvait pas s'attendre à de l'objectivité et de la gentillesse. Elle allait donner son nouveau prénom quand Hannah la prit de court et lui rappela comment la pétillante française avait laissé sa place à la farouche irlandaise. Ce fut à peine visible, mais les épaules de la démone se nouèrent — le souvenir n'était décidément pas agréable — l'espace de quelques secondes durant lesquelles elle regretta amèrement de ne pas avoir mis les choses aux claires avec sa protégée sur la façon dont il fallait partager les informations avec l'ennemi. Certes, elle avait présenté Plume sous un jour rassurant, mais tout de même ! La scandinave aurait préféré que sa capacité à survivre aux balles de sniper en pleine tête restât un peu moins certaine.
    « Tu n'as qu'à continuer à m'appeler Elle, répondit-elle avec bonne humeur. Je vois que tu es devenue raisonnable et que tu as renoncé au fusil d'assaut. Peut-être que la prochaine fois, tu viendras à moi de façon civilisée. » Contrairement à leur première rencontre, la démone n'était cependant plus désarmée. Si Hannah l'ignorait, Elle avait pris soin de dissimuler dans la maison quelques armes, au cas où. Des armes qui lui avaient été diablement utiles quand il lui avait fallu défendre son petit territoire. « Hannah, je te présente Plume. Ne te laisse pas abuser par sa petite frimousse, je la soupçonne d'être une véritable peste. » Petite pause durant laquelle elle sourit à l'une et à l'autre. « Alors, dis-moi, que veut ton maître, cette fois ? »
    La formulation était volontairement provocatrice et c'était voulu. Moira n'était toujours pas ravie de savoir qu'un humain eut pu mettre la main sur elle et le fait qu'il avait entraîné une ange avec lui n'arrangeait rien. Posant une main qu'elle voulait rassurante sur l'épaule de Hannah, elle attendit, tranquille. Elles n'allaient tout de même pas se battre ici, hein ?

Age : 33 Messages : 9 Date d'inscription : 14/06/2012

-Une balle dans la tête ? C’est des choses qui arrivent, gloussa-t-elle. Ca fait mal, hein ?

Plume donnait l’impression de parler boutique et que prendre une balle dans la tête et survivre était tout simplement normale. Rien dans l’attitude de l’ange ne laissait paraitre qu’elle avait conscience de l’énormité de ce qu’elle venait de dire. La jeune fille s’écarta lentement de la porte et attrapa la chaise de bureau d’Hannah qu’elle fit tourner et s'accroupi dessus face à l’humaine et à la démone. A la mention de leur dernière rencontre la jeune fille parue un peu embarrassée.

-Ouais, le fusil d’assaut pour la discrétion c’est pas le plus pratique et pour le reste laisse-moi au moins essayer d’augmenter mes chances de survie si, finalement, on en vient à une discussion moins… civilisée. Et puis tu n’es pas la seule à ne pas apprécier mon charme.

La démone présenta l’ange à l’humaine, sans oublié de préciser qu’elle était surement une véritable casse couille sous ses dehors candide, comme si l’attitude de l’ange laissait place au moindre doute sur ce point. La gamine répondit d’une manière tout en accord avec son apparence en tirant la langue dans une grimace adorable et tout en puérilité.

-Alors, dis-moi, que veut ton maître, cette fois ?

L’ange poussa un soupir théâtral, la tête posée sur ses genoux ramenés sous son menton. Se reculant dans la chaise de l’humaine, elle leva les yeux au ciel, son visage ayant l’air de chercher une expression à adopter en passant rapidement par tout un panel d’expression plus ou moins contradictoire avant de s’arrêter finalement sur ce qui pourrait passer pour de la confusion. L’ange se déplia gracieusement, le coude sur l’accoudoir la tête reposant dans sa main. Elle fit un geste étrange de la main gauche, laissant un instant voir l’éclat d’une lame et se retrouva avec une barre chocolatée entre les doigts. Elle jeta un regard interrogateur vers ses interlocutrices produisant une seconde barre avant de la poser sur le bureau sous l’œil inquisiteur de la démone. La gamine entreprit ensuite d’ouvrir avec un luxe de précaution proche du monomaniaque la barre qui lui restait.

-Tu devrais te détendre, je ne suis pas si stupide, elle semblait plutôt offensée par la réaction de la démone. J’en sais trop rien. La même chose que la dernière fois, je suppose. Et, je pense, qu’il me voit plus comme ça fille, après ça lui déplairait surement pas.

Elle se tourna vers l’humaine alors qu’elle libérait proprement la sucrerie, récupérant la barre et un rectangle de papier froissé mais intacte.

-Et le lord, euh… Hellish… Ou peu importe, c’était surement pas son nom de toute façon. Il te voulait quoi, Hana-tan* ?

La jeune fille entreprit de transformer le papier de la barre chocolaté en une jolie baleine en origami mais le papier ne semblait pas vraiment avoir envie de se plier à la volonté de l’ange.

*tan c'est le suffixe honorifique japonnais chan mais prononcé par les enfants qui ont du mal à prononcé chan.

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