Don't look at me [PV Liam]

Deux mois ! Deux mois ENTIERS de colle coincée avec cette garce qui se prétendait être mon amie ! Alors OK, j'avais l'habitude depuis un an avec Liam, mais c'était pas une raison ! En l'espace de dix minutes, je l'avais détestée autant que je l'avais aimée, et elle allait me payer cette souffrance et cette humiliations, les insultes qu'elle m'avait crachées au visage et les coups qu'elle m'avait donnés et rendus. Ma peau pâle marquait d'un rien, et j'étais couverte de bleus partout où j'avais pris ses pieds. Un sparadrap et un morceau de gaze appliqués par l'infirmière masquait la morsure sur mon bras, mes cheveux étaient encore tout emmêlés, je n'avais pas pris la peine de les recoiffer.

Elle allait me payer ça. Elle allait me payer pas la douleur physique, que je lui avais largement rendu, mais toute la souffrance morale et l'humiliation. Elle avait craché sur lui, sur nous, et espérait pouvoir s'en tirer comme ça ? Et dans le même temps, je me détestais de prendre sa défense alors qu'il n'avait rien fait pour moi jusque-là ou presque, alors qu'elle avait fait tant de sacrifices à mon égard. Il ne le méritait pas, en tout cas il le méritait moins qu'Alice. Mais je l'avais fait, j'avais pris fait et cause pour lui, contre elle. Foutues hormones ! Elle avait raison, c'était à cause de ça en fait. J'avais lu un jour que les hyperactifs aimaient plus le sexe que les autres. Bon, jusqu'à maintenant c'était pas tellement mon cas, mais peut-être qu'il fallait juste que j'y goûte une fois pour déclencher le truc ?

En tout cas, elle et moi avions été le point de mire du lycée pour le reste de l'après-midi, écartant tout le monde à l'aide de regards plus mauvais que jamais. Elle comme moi étions très douées en la matière, mais ça m'énervait au possible de voir que nous nous comportions pareil. Comme toujours. Heureusement, à la fin de la journée, elle avait dû retourner avec les sales mômes, et j'en avais été profondément soulagée.

A peine la cloche avait-elle sonné la fin des cours que je me précipitai dans les couloir du lycée, courant presque. Un bon jogging, voilà ce que j'allais faire pour me défouler. Courir jusqu'à en être épuisée, jusqu'à n'en plus pouvoir et m'écrouler, abrutie de fatigue. Simplement tout oublier. Je bousculais les gens en m'en foutant éperdument, regard résolument fixé au sol, je voulais juste partir de ce lycée qui m'étouffait, jusqu'à ce que je rentre en plein dans quelqu'un.

Je relevai les yeux rapidement et pris de plein fouet le regard glacial de Liam.

Je posai vivement une main sur mon bras, masquant mon sparadrap, et marmonnai en le dépassant, m'arrêtant à peine de marcher :

- Désolée pour tout à l'heure. Je file, je dois vite rentrer chez moi.

Qu’est ce qu’il lui avait prit ? Je ne comprenais pas cette fille parfois. Cela faisait trois jours et je me demandais si elle ne m’évitait tout simplement pas. Je la laissais faire, pour le moment. Elle avait besoin de temps, je pouvais comprendre. Du temps, de la patience, il me faudrait tout ça et je le savais. Pourtant, c’était difficile. Très. Jouer la comédie en cours malgré tout, ne pas la regarder, jamais. Je souffrais de ça, mais je le faisais pour nous. Seulement là…Etre convoqué par la proviseure et trouver deux de mes élèves qui auraient du être en cours avec moi, assises en face d’elle. Voir Blake, blessée…Alice tout autant. Je les avais fusiller du regard, je ne savais pas ce qu’il c’était passé mais le résultat était deux mois de colle, elles avaient évité de justesse l’expulsion parce que tout de même, elles s’étaient retrouvé enfermées sans le savoir donc j’avais passé l’éponge sur leur absence a mon cours.

Néanmoins, ma patience avait ses limites, même si Blake les repoussaient sans cesse. Elle me manquait. Trop. Alors tant pis, je m’arrangeais pour être sur son passage, elle courait presque, les yeux baissés et me heurta. Me voir n’eut pas l’air de la troubler puisqu’elle tenta une fuite maladroite. Je te connais très bien mon amour…Je lui attrapais le bras, juste au dessus du coude. Je ne serrais pas, lui faire mal n’était pas dans mes intentions.

« Non. »

Sifflais je entre mes dents avant de l’entrainer derrière moi jusqu'à ma classe. L’école se vidait et heureusement, on ne fit pas spécialement a nous. Sans compter que tout le monde savait qu’elle avait séché mon cours…Je la poussais dans la salle vide, me retenait d’être brutal avec elle, même si j’avais envie de la secouer dans tout les sens, ne la lâchant pas pour autant avant de lui plaqué le dos sur la porte, pensant a fermer celle-ci d’ailleurs. Mon avant bras se posa juste au dessus de sa tête alors que j’arrimais mon regard au sien. Bon sang ! Je crevais de l’embrasser…

« Qu’est ce que tu fous Blake ? A quoi tu joue exactement ? »

Je sursautai violemment quand sa main empoigna mon bras et fermai les yeux une poignée de secondes, résignée. Il m'entraîna brutalement avec lui, me faisant pivoter et repasser le couloir en sens inverse, jusqu'à atteindre sa salle dans laquelle il me poussa brusquement. Un infime cri de frayeur m'échappa, mes ongles s'enfonçant dans mes paumes. Je le détestais lorsqu'il était comme ça. Je détestais tellement lorsqu'il était violent avec moi ! Le pire était sans doute que je voyais atrocement bien qu'il se contenait.

Acculée. Dieu que je haïssais cette sensation, être dos au mur contre lui me faisait trembler de terreur. Un violent frisson électrisa mon corps, le traversant comme un coup de fouet, une vague qui tenta de me jeter contre lui, mais je parvins à me contenir, plaquant mes paumes au mur comme pour mieux y adhérer. Comment faisait-il pour me donner envie de me précipiter dans ses bras alors qu'il me terrorisait ? Je trouvais ça affreusement malsain, bien plus que le simple fait de sortir avec un prof, en tout cas !

- Arrête ça ! Tu me fais peur ! m'écriai-je, encore avec des restes de colère, les larmes aux yeux.

Éloigne-toi ! Je perdrais toute crédibilité si je t'embrassais passionnément en me jetant à ton cou. Ah, c'était inhumain ! Ce manque de lui, alors qu'il était si proche, me crevait la poitrine et me creusait le ventre atrocement. Ses mains chaudes sur ma peau, ses douces caresses, sa langue endiablée contre la mienne... Non ! Concentration. J'étais en colère, et contre lui aussi, parce que c'était lui qui avait provoqué tout ça. Il n'aurait pas dû m'en vouloir, il aurait dû se comporter comme avant-hier, pas comme un prof tout prêt à punir son élève d'avoir séché !

- Recule ! Je ne joue à rien du tout. Alice nous a vus sur le parking l'autre jour !

« Arrête, tu sais très bien que je ne te ferais pas de mal. »

Fis je dans un murmure presque rageur parce que même si j’étais en colère, contre elle, contre moi parce qu’elle me manquait, je n’étais pas assez fou pour lui faire mal. La blesser reviendrait a me faire mal aussi. Je résistais a l’envie de la toucher, de glisser ma main autour de sa nuque de l’attirer contre mes lèvres. Sa bouche si tendre me manquait douloureusement. Je vis les larmes perler a ses yeux.

« Blake…Ne me fais pas ça… »

Soufflais je en les voyant affleurer a ses cils, puis je soupirais douloureusement conscient de l’endroit où nous étions avant de me redresser et de reculer de deux pas. Je lui tournais le dos, tentant de remettre de l’ordre dans mon esprit, me passant une main nerveuse dans les cheveux. Avant de me figer et de la regarder, incrédule.

« Quoi ? »

Merde ! J’étais le premier a dire qu’il fallait qu’on se cache, qu’on soit discret et j’avais lamentablement foiré. C’était le cas de le dire. J’inspirais profondément avant de revenir vers elle, de glisser ma paume sur sa joue, laissant mon pouce errer un instant sur le renflement de sa lèvre inférieure.

« C’est pour ça que vous vous êtes battue ? Tu as mal ? »

Parce que je voyais sa peau marquée et je ne supportais pas ça. Je serrais les dents, fermant a demi les paupières pour résister a l’envie d’aller faire ravaler a Alice son agressivité. Bon sang ! mais je ne pouvais pas ! J’étais un adulte, un professeur…Je devais rester calme, c’était primordial. Mes doigts glissèrent dans ses cheveux alors que je les mettait doucement derrière son oreille.

« Bien, elle nous a vu…Ca devait sans doute arriver un jour, mais elle n’a rien dit pourtant…Raconte moi… »

Quoi quoi ? Elle nous avait vus, c'était tout. Pas besoin d'épiloguer dessus pendant des heures. Tout mon corps se tendit alors que sa main se posait sur ma joue et je fermai les yeux une fraction de seconde, trop désireuse de m'abandonner à ce contact. Je me repris instantanément et saisis sa main, l'éloignant brusquement de mon visage, mais alors que j'aurais voulu la lâcher, mes doigts s'emmêlèrent spontanément aux siens, et je serrai les dents, maudissant ma faiblesse, maudissant mon corps qui ne m'obéissait même plus - ou m'obéissait trop bien, c'était selon.

- Je me fous d'avoir mal, tant qu'elle a mal aussi, grognai-je.

C'était puéril, c'était débile, mais c'était vrai. Ouais, j'avais mal, mes jambes toutes marquées de bleus me lançaient au moindre pas et sa morsure et ses griffures palpitaient doucement sur ma peau, mais ce n'était rien comparé à la douleur morale. Elle m'avait tuée, rabaissée plus bas que tard, bafoué notre amitié en un claquement de doigts, la pourrissant en quelques paroles bien placées.

A ses mots, je le lâchai soudainement, posai mes paumes à plat sur sa poitrine et le repoussai violemment.

- Elle n'a rien dit ? Elle n'a rien dit ? Elle a tout dit ! Elle m'a traitée de salope, de pute, elle a dit que je baisais avec vous pour remonter mes notes, et ce n'est que la moitié de ses insultes ! J'aurais cent fois préféré qu'elle balance la vérité à la proviseure ! Ma meilleure amie me déteste maintenant, à cause de vous, et moi qu'est-ce que j'ai fait ? Qu'est-ce que j'ai fait, hein ?

A peine consciente de ce que je faisais, je me rapprochai brusquement de lui et le saisis par sa chemise, le secouant de toutes mes forces - guère efficace mais j'avais besoin de me défouler, et pas sur un mur cette fois !

- Je t'ai défendu ! criai-je. J'ai pris fait et cause pour toi, malgré tout ce qui s'est passé, malgré tout ce QU'ELLE a fait pour moi ! Je ne sais même pas pourquoi ! J'aurais dû me confondre en excuses pour ne pas lui avoir dit tout de suite... et... et...

J'éclatai en sanglots, le lâchai brusquement et m'écroulai carrément par terre, en larmes. Je n'étais jamais dans la demi-mesure et là, je piquais franchement une crise de nerfs. Mon visage en larmes enfoui dans mes mains, je sanglotais éperdument, sans me soucier de là où nous étions, sans me soucier de ma position qui faisait dangereusement remonter ma jupe sur mes cuisses. Je m'en foutais éperdument ; j'avais perdu ma meilleure amie, et c'était plus que je ne pouvais en supporter. Que pourrais-je jamais faire sans Alice ?

Bon sang ! C’était plus profond que je ne l’avais cru au premier abord. Je n’avais pas honte de l’aimer, mais je savais pertinemment que cela restait condamnable. Trop sans doute. Elle me repoussa et je reculais, ne voulant lui opposer un mur alors que c’est surement ce qu’elle aurait eu a pousser si je l’avais voulu. Elle me hurla au visage. La colère enflait en elle, en moi. Alice nous avait tout simplement salit, comme ça…

« Arrête de hurler Blake… »

Rugis je sans grand effet hélas. Elle avait besoin d’évacuer tout ça, je le savais. Il fallait que ça sorte, c’est pour ça que je la laissais tenter de me secouer, sans grand succès d’ailleurs, me retenant de la toucher, de la maitriser et pourtant, j’aurais du le faire en la voyant s’écrouler sur le sol. J’eus mal de la voir ainsi. Si mal qu’un instant je suffoquais. Je ne supportais pas ses larmes. Je m’accroupis avant de glisser mes bras autour d’elle, de la porter contre moi, inspirant malgré moi le parfum de ses cheveux avant d’aller m’assoir a mon bureau, elle sur mes genoux.

Mes doigts glissaient sur ses cheveux, doucement, tendrement malgré la colère qui me secouait. Je m’en voulais terriblement. Je nous avait entrainé vers la souffrance avec un sourire angélique. J’aurais du la repousser, ne pas l’écouter…Ne pas céder…

« Ca va aller…Tu es si maladroite parfois… »

Je soupirais contre ses cheveux avant de la forcer a me regarder, doucement, je voulais voir l’éclat de ses yeux…

« Alice t’aime. Toi aussi tu l’adore. Toutes les deux, vous êtes excessives, blessantes sans même le savoir…Je lui en veux de nous avoir salit, c’est vrai, de réduire ce que je ressens pour toi a juste un déchet. Je ne veux pas qu’elle te salisse, en aucun cas tu seras pour moi ce qu’elle a dit, jamais. »

J’essuyais doucement ses yeux, ses larmes qui maculaient ses joues.

« Si tu pense l’avoir perdue, c’est que ce n’était pas une amie…Maintenant, réfléchis. Calmement. N’aurais tu pas aussi été en colère si elle t’avait caché quelque chose comme ça ? Je suis désolé, Blake, je t’ai demandé de ne rien dire, j’ai mis un poids énorme sur tes épaules…Et pourtant, je ne regrette rien…Absolument rien. »

J’effleurais timidement ses lèvres, je ne voulais pas m’imposer avant de la regarder de nouveau.

« As-tu confiance en elle ? »

Je me foutais qu'il me demandât d'arrêter de hurler, je me foutais qu'on puisse nous entendre ! J'avais besoin d'évacuer la souffrance qui me tailladait en morceaux, et ce n'était pas en expliquant les choses calmement que j'y arrivais. Mes crises de colère, de peur, ou de tout autre chose étaient toujours violentes, toujours destructrices. Je ne pouvais pas faire autrement sous peine de réellement imploser, et il faudrait qu'il compose avec ça. Égoïste ? Peut-être. Mais à l'instant t, je m'en foutais éperdument.

Je sursautai lorsque je me sentis soudainement décoller du sol, et m'agrippai à son cou, ouvrant des yeux immenses sous l'effet de la surprise. Lorsqu'il s'assit sur le bureau, me calant sur ses genoux, je me recroquevillai contre lui instinctivement, mon corps épousant le sien, mes bras toujours noués autour de sa nuque. C'était naturel, évident. Je pleurais en silence maintenant, sanglots étouffés noyant mes joues. Fascinant, ce don qu'il avait pour m'apaiser si rapidement. Juste un geste...

- Elle peut pas m'aimer et me balancer des choses pareilles, balbutiai-je. Et puis moi aussi je lui ai... Je l'ai insultée...

Je baissai la tête comme une enfant prise en faute, ce qui était d'ailleurs un peu le cas.

- C'est elle qui m'a d'abord insultée. Mais c'est moi qui l'ai frappée la première... C'était la première fois. Je n'aurais pas dû...

Je respirai profondément. Je devais admettre qu'il n'avait pas tort. Moi aussi, j'aurais été atrocement blessée si elle m'avait dissimulé une chose pareille si longtemps... Deux jours... C'était si peu, et tellement trop.

- Je sais pas. Je n'ai jamais eu ce problème-là avec les filles. Kieran, il le sait. Kieran, je sais que je lui fais confiance. Alice, je ne sais plus...

Ma bouche cherchait avidement la sienne. Ses bras autour de mon corps me faisaient craquer. Je n'étais plus en colère, je cherchais juste avidement son réconfort.

Ses boucles roulaient sous mes doigts en un rythme lent, rythmé. Un peu étrange mais je ne me permettais que cela. Elle se cramponnait a ma nuque, noyant ses larmes sur mon épaule et je me contentais de l’écouter, glissant parfois une remarque qu’elle écoutait malgré tout.

« Blake, vous êtes si semblable…Mais dis toi que les mots ne sont que ce que l’on veut en faire oui, mais parfois, ils nous échappent sans que nous ne puissions rien y faire. »

Je n’aimais pas que l’on nous salisse a cause de moralité qui n’avait pas lieu d’être. Je n’avais pas demandé a tomber amoureux d’elle…Je n’avais pas souhaité tout ça, mais maintenant, je savais que je ne regrettais rien. Cela faisait peur. C’était terrifiant.

« Arrête de penser a ça et concentre toi plutôt sur ce que tu dois faire maintenant. »

Parce que le mal était fait, rien ne pourrait faire remonter le temps. On avait pas le choix que de faire avec des choix qui parfois nous dépassait. C’était ainsi. Je me raidis lorsqu’elle parla de Kieran. Un relent de jalousie immature sans doute et pourtant, je savais que j’avais une part de faute dans l’histoire. Je n’aurais jamais dut frapper un élève. Fait étonnant, il n’avait rien dit…Son comportement n’avait pas changé, comme si il avait oublié, ou que rien ne s’était passé…Je soupirais.

« Bon sang mais tu veux mettre tout le lycée au courant ? »

J’étais agacé oui, parce que je savais qu’elle prenait de gros risques, même si elle faisait confiance, elle restait naïve. Je me mordis la lèvre en me demandant soudain si on allait pas finir tout les deux enfermés dans un coin. Je ne pouvais pas comprendre pourquoi on nous refusait tout simplement le droit a ça…C’était moralisateur, ancré dans les mœurs mais le cœur se fiche des mœurs…Elle chercha mes lèvres, comme désespérée et je les lui donnait. Goutant dans un soupir la saveur de sa bouche qui me manquait, trop sans doute. Mes doigts agrippèrent ses cheveux et je murmurais entre deux soupirs :

« Ne sèche plus jamais mon cours, Blake… J’ai besoin de te voir, de t’entendre…»

Le problème était justement que je ne savais pas ce que je devais faire maintenant. J'étais encore en colère contre elle, terriblement et pourtant je souffrais de lui avoir dit tout ça, et j'étais douloureusement consciente que si ça me faisait mal, même un tout petit peu, c'était que je ne la détestais pas. Pas vraiment. Il me forçait à analyser mes sentiments, à voir à travers ma colère, c'était quelque chose que je n'avais jamais fait et ce n'était pas spécialement agréable. J'aurais voulu rester enfoncée puérilement dans cette aigreur, cette fureur, sans avoir à réfléchir, c'était tellement plus facile ! Mais sans doute était-il trop adulte pour me le permettre. Si c'était vraiment ça, alors je ne voulais pas être adulte.

Je lui jetai un regard de reproche lorsqu'il protesta à l'idée que Kieran était au courant.

- Évidemment que non, mais je lui devais des explications, vous ne croyez pas ? J'ai besoin de Kieran. Il m'apaise. Comme le théâtre, ajoutai-je avec un sourire en coin.

Un soupir m'échappa alors que sa bouche s'emparait finalement de la mienne, répondant à mes attentes, à un baiser désespéré, pour lequel nous avions été trop douloureusement patients. Avant-hier. Deux jours, deux tout petits jours, c'était si peu, et pourtant j'avais l'impression que tout s'était déroulé dans une autre éternité. Je fermai les yeux de bonheur lorsque ses mains raffermirent sa prise dans mes cheveux, maintenant mon visage si délicieusement près du sien. Je me laissai légèrement glisser de ses genoux pour pouvoir pivoter et nouer carrément mes jambes autour de sa taille, assise en tailleur à moitié sur le bureau, à moitié sur lui.

- Mais c'est tellement dur de te voir indifférent... Comme si rien ne s'était passé... Je ne pensais pas que ce serait si terrible...

Mon souffle haletant n'était plus qu'un murmure alors que son contact m'enflammait, me rendant si brûlante que je peinais à respirer régulièrement. Dommage, aujourd'hui je n'avais pas la mer à disposition pour me rafraîchir les idées. Mes jambes enserrèrent davantage ses hanches, mes bras emprisonnèrent encore plus sa nuque, alors que le baiser se faisait plus profond, plus joueur, que mes doigts s'emmêlaient dans ses cheveux de la même façon que ses soupirs se mêlaient aux miens. En un claquement de doigts, il avait fait s'envoler tous mes doutes...

J’aurais sans doute crevé de jalousie pour ce qu’elle me dit avant. Elle avait besoin de ce gamin pour s’apaiser, c’était un rôle que je voulais confusément quelque part. Mais je ne dis rien, me contentant de sourire légèrement. J’étais aussi exclusif qu’elle, je m’en rendais compte. Je voulais être tout ou rien, mais pas la moitié de quelque chose, pourtant, je devrais être heureux qu’elle s’ouvre aux autres.

« Je vois…S’il t’apaise, c’est tant mieux. »

Je n’en pouvais plus, je devais l’embrasser, la toucher. Pensait elle que mes cours étaient si facile a donné avec elle ? Chaque seconde était une torture, ne pas la regarder, ne pas frémir au son de sa voix, ne pas la revoir, éclatante d’extase alors qu’elle découvrait le plaisir. J’y arrivais, j’étais plus vieux qu’elle, plus expérimenté, je le faisait pour nous, juste pour nous. Mais parfois, j’avais juste envie de tout envoyer valser.

Elle bougea, m’enserrant dans l’étau délicieux de ses cuisses et une flèche de désir brutal me perça les reins. Oh mon dieu ! Elle me manquait avidement. Malgré moi, mes paumes retrouvèrent la chair soyeuse de ses cuisses, mes lèvres les siennes.

« Je t’avais prévenu Blake. Ce n’est pas facile pour moi non plus. Deux jours, j’ai espéré que tu vienne me voir, mais tu ne l’a pas fait. C’était long Blake, si long. »

J’enfouis mon visage contre son cou, embrassant avidement sa chair avant d’arrêter, d’inspirer profondément. On était en plein milieu du lycée, c’était vraiment du n’importe quoi. Je fermais les yeux sur le brasier qui les consumait, refreinant mon envie terrible d’elle avant de les ouvrir a nouveau, scrutant avidement ces traits, comme pour les graver dans mon cœur alors qu’ils y étaient a jamais.

« Je sais que tu souffre de ça. J’aimerais pouvoir t’aimer au grand jour mais pour le moment c’est impossible. Je n’aime pas voir le doute dans tes yeux, ne doute pas de moi. »

Je caressais sa joue, la pulpe de ses lèvres.

Je ne pressentais même pas sa jalousie parce qu'à l'instant, j'avais beaucoup trop besoin de son contact et de ses baisers pour réfléchir à quoi que ce soit d'autre. Ses mains glissant sur mes cuisses me firent violemment sursauter, alors que tout mon corps s'embrasait, et un léger gémissement m'échappa alors qu'une de mes mains agrippait ses cheveux, et que l'autre enserrait sa nuque. Comment avais-je pu douter ? C'était évident qu'il m'aimait, tellement évident... J'étouffai son cou de baisers, prêtant à peine attention à ce qu'il me disait.

- Je viendrai... Promis, je viendrai, je ne veux plus rester si longtemps sans te voir.

Un gémissement un peu puéril de protestation m'échappa alors qu'il s'arrachait à moi, laissant ma peau en manque, trop avide de ses baisers brûlants pour pouvoir être apaisée. Il parlait du doute dans mes yeux, alors qu'à l'instant ils le dévoraient tout entier, deux émeraudes brûlantes d'amour et de désir ? Il n'y avait pas le moindre doute en ce moment. Juste un désir poignardant que j'étais trop novice pour contrôler. J'avais envie de lui faire l'amour, je me foutais de l'endroit où on était, je me foutais qu'il restait encore quelques personnes dans le lycée, je me foutais de savoir que la porte n'était même pas fermée, et surtout je me foutais de donner l'impression de n'être qu'une obsédée, j'avais besoin de lui de la manière la plus absolue qui soit. J'embrassai ses doigts se promenant sur mes lèvres, alors que mes paumes tiraient sur sa chemise, la libérant de son pantalon afin qu'elles puissent se glisser sur son torse.

- Je ne doute pas de toi...

Mes doigts enserrèrent ses hanches.

- ... Simplement, je ne parviens pas à te voir comme tu es maintenant...

Remontèrent sur sa poitrine.

- ... Alors que tu m'ignores purement et simplement...

Mon bassin se colla davantage au sien alors que mes mains redécouvraient son torse sous sa chemise, que mon visage se nichait de nouveau dans le creux de son cou, qu'une langue mutine caressait délicatement sa peau de la pointe, et en un gémissement étouffé de protestation, je soufflai, tentant bravement de me souvenir d'où nous étions :

- Emmène-moi chez toi, je t'en prie !

Ses yeux étaient immenses. Noyés de désir, d’envie. Je pouvais m’y voir, ondoyant alors qu’elle me disait qu’elle viendrait. Mais était ce réellement la vérité ou juste des mots jetés sous l’influence de l’envie qu’elle avait de moi en cet instant ? Etait ce lui qui guidait ses mots ? Je n’en savait rien, mais la voir si féline alluma un brasier dans mes reins. Son gémissement me rendait totalement fou. Ma peau frémit de son contact, violemment et je serrais les dents laissant le feu qui me dévorait soudain se déverser dans mes iris assombrit. Avait elle seulement idée de l’effet qu’elle me faisait ? En jouait elle sciemment ou se découvrait elle réellement ? Je m’en fichais au fond, qu’elle joue si cela lui plaisait.

Je fermais les yeux, la chair brulante sur le passage de sa langue mutine, presque hésitante, sur ses mains qui me consumait…Elle avait raison, pas ici…Jamais ici…Je stoppais ses mains, posant les miennes dessus. J’inspirais l’air, avide d’une bouffée de fraicheur, espérant idiotement que cela me calme avant de m’éloigner d’elle, de quitter l’étau de ses cuisses, de me lever, conscient du brasier qui me dévorait les reins. Fouillant mon sac, j’en sortis un trousseau de clé que je lui déposais dans la paume.

« On ne peut pas partir ensemble, Blake…Attends moi chez moi, je n’en ai pas pour longtemps ici. »

Puis, je glissais mes paumes sur ses joues, cherchant sa bouche qui s’ouvrit sous la mienne. Une promesse d’encore plus, de toujours alors que je jouais sur la pulpe de ses lèvres. Elle était brulante contre moi. Je m’arrachais avec difficulté a ses bras, avant de lui sourire, troublé.

« Dépêche toi… »

Fis je doucement en la descendant du bureau, délicieuse ainsi, le visage rosé, le souffle saccadé. Mais pas ici…Je voulais pleinement lui faire l’amour, pas la prendre a la va vite sur un bureau au risque de nous faire surprendre…