Alice Manet - Today was a fairytale

Il est facile de dire que l'on est beau. Encore faut-il le prouver ; je vous mets au défi d'égaler le nombre de têtes que je fais tourner en une seule journée ! Il n'est rien d'éxagérer en cette remarque, et pourtant le seul à qui j'offrirais ce physique ne me regarde pas. J'ai tout pour plaire cependant, c'est ce que je ne comprends pas.

De longues jambes fermes, dépourvues de défauts, le plus souvent offertes aux regards des spectateurs, entament mon corps dénué de graisse. Une légère poitrine vient pimenter le tout. Ma peau est d'ivoire et de pêche, prenant couleurs selon les émotions, rougissant sous la gêne et le vent, rosissant lorsque le bonheur est au rendez-vous. Que dire encore de mon visage entouré de cascades brunes et blondes. Parfois ondulés, parfois plats, mes cheveux reflètent toujours la divine lumière afin d'éblouir un peu plus, si possible. J'en prends grand soin évidemment, il ne faudrait pas que ma beauté soit abimée.

Mon visage se compose de lèvres pleines et roses, d'un petit nez retroussé, avec juste ce qu'il faut de perfection pour donner l'impression d'un ange. Mes yeux sont encadrés par de longs cils noirs qui font ressortir le chocolat liquide de mes iris avec merveille, ce même chocolat qui brille de milles éclats sous la joie immense d'être près de mon Laurys...

Nous sommes dans le siècle des enfants rois. Je ne fais pas exception à la règle.

Enfant unique, enfant gâtée, habituée à avoir tout ce qu'elle veut au moment même où elle le demande. Une donneuse d'ordres née. Voilà comment les gens pourraient me décrire. Autoritaire. Égoiste. Mais ai-je réellement besoin des autres ? Je me suffis. Je suis belle et intelligente, très intelligente. Bourrée de talents.

J'ai toujours su me faire pleins d'amis qui ne comptaient pas vraiment pour moi. Ils m'aimaient pour ce que je représentais, à savoir le succès. Mais le reste ? Pas de meilleures amis à qui se confier. Discrète, voilà ce que je pouvais avancer. Mais encore, pouvons-nous qualifier de discret une fille comme moi qui prend sa place ? Audacieuse, peut-être.

Je n'ai pas de passions. J'excèle dans tout ce que j'entreprend, mais rien ne m'intéresse vraiment. Le théâtre ? Trop volatile pour un esprit comme le mien. Scientifique ? Trop tachant. Je souhaitais seulement être libre de mes mouvements, trouver quelqu'un qui m'aimerait assez pour le comprendre.

J'ai trouvé. Ma passion, c'est lui, l'amour de ma vie.

Oh, Laurys.

Ma vie n'a jamais été difficile. Je suis née enfant unique, j'ai vécu enfant unique, je mourrai enfant unique. Dieu sait que les enfants uniques sont des princesses dans ce monde capitaliste. Mes parents ont toujours payé tout ce que je désirais : d'abord les jouets, ensuite les vêtements et le maquillage. Aussitôt qu'un nouveau cellullaire sortait, je l'avais. Idem pour les collections de Gabana ou de Chanel.

Contrairement à beaucoup d'enfants sans frères et soeurs, cependant, mes parents ont toujours ét présents pour moi. Ils m'amenaient avec eux en voyage, passaient du temps à jouer avec moi ou seulement à parler au téléphone. Ils croyaient fermement en la relation de confiance entre les géniteurs et le bambin.

Ça réussit plutôt bien. J'étais douée dans tout ce que j'entreprenais, du sport aux arts en passant par les disciplines académiques. Une jeune fille qui pouvait plaire à tous ceux qu'elle rencontrait. Les professeurs m'aimaient. Les filles appréciaent ma richesse et mes talents. Les garçons aimaient ma beauté.

Moi, pourtant, je n'avais aucun intérêt pour les garçons de mon école. Ils étaient semblables, changeaient sans que je ne m'en rende compte. Je pense que, quand on a tout ce qu'on veut, on désire quelque chose de hors du commun.

Et j'ai trouvé. Laurys est un charmant jeune homme, à ceci près qu'il est mort depuis près d'un millénaire. Ça ne fait évidemment aucune différence pour moi. Je l'aime. j'aime un démon, un très gentil démon, et je veux l'épouser. Avoir des enfants. Être heureuse.

Si seulement il pouvait céder.

Si seulement il ne devait pas dévorer mon âme.