Jane E. Smith

Plume s’est transformée en ange alors qu’elle n’avait encore qu’à peine plus d’une petite douzaine d’année mais elle approche malgré tous des deux siècles d’existence. Blonde aux yeux d’un bleu-gris saisissant, elle ressemble à une délicate poupée d’ivoire. Son état angélique a magnifié ses traits pour en faire des armes redoutables dans la guerre qui oppose Dieu à Satan. Bien que Plume soit d’une taille tout à fait correcte pour une enfant du siècle en cours, ni trop grande, ni trop petite, sa stature reste celle d’une mignonne petite blonde aux airs de fragile poupée de porcelaine. Plus que sa stature, ses traits renforcent cette première impression de fragilité, tant la légère rondeur enfantine de ses joue, que la douce courbe pleine de ses lèvres participent de cette illusion. Et la plupart du temps ses yeux réussissent à garder l’innocence de l’enfance mais il lui arrive parfois de perdre le contrôle de ses émotions et réactions et, pour un court, instant on peut contempler les nombreuses années qu’elle a traversées. Mais plus que ses yeux, c’est son corps qui trahira plus surement le passé quelque peu tumultueux de la jeune ange. Celui-ci est encore marqué par les vestiges de l’entrainement qu’elle a subis quand elle n’était encore qu’une enfant mortelle. Pourtant ce ne sont pas ces vieilles cicatrices, déjà passée, qui surprendront le plus mais celle plus récente qui orne sa hanche gauche. Un tissu cicatriciel rosâtre, reste d’une brulure qui malgré son état angélique ne semble pas vouloir disparaitre même après plus d’un quart de siècle.

Plume est quelqu’un de foncièrement loyale, gagnez son respect et sa loyauté et vous les aurez pour l’éternité, enfin tant que vous n’essayez pas de la descendre ou de la spolier de ses biens. Si jamais vous perdez son respect… espérez que quelque chose l’arrête ou perdez tout espoir, elle est assez rancunière.
La séraphine est aussi quelqu’un de plutôt pragmatique et réaliste, du moins la plupart du temps. Elle a un sens aigu de sa propre place et vous ne la verrez jamais aller contre la volonté d’un archange. Quand elle doit traiter avec des anges de ce calibre, elle est froide, distante et joue parfois les idiotes finies, parce qu’elle trouve que cela simplifie grandement les choses de les gérer de cette manière.
Plume reste aussi fondamentalement une enfant. Il lui arrivera parfois d’avoir des réactions très en accord avec l’apparence qu’elle a, des réactions très puérile, parfois inutilement cruel et d’autre fois, elle pourra simplement faire quelque chose de hautement stupide juste pour se distraire ou juste parce qu’elle trouve ça amusant. Elle trouve la chasse au démon particulièrement amusante d’ailleurs. Pourtant elle peut aussi se montrer d’une méticulosité maladive pour certain sujet.

Plume était allongée à plat ventre sur le sol de sa chambre de son penthouse de Londres. Ses pieds battaient la mesure d’une musique qu’elle était seule à entendre alors qu’elle lisait le quatrième tome du Trône de fer, une sucette dans la bouche. Les papiers de plusieurs barres de chocolat reposaient nettoyés à côté d’elle, tous nettes et proprement plié, sans une seule déchirure. A côté, plusieurs livres sur les guerres napoléoniennes étaient ouverts, comme si elle avait abandonné leur lecture en plein milieu. Le sol de sa chambre était d’ailleurs recouvert de pile de livre traitant d’un large panel de sujet et les étagères croulaient aussi sous ceux-ci.

-Je t’avais demandé de lire autre chose.
-Les guerres napoléoniennes et le jardinage, ça me gave, répondit l’ange sans lever le nez de son livre.
-Tient.

Voyant que sa contractante n’avait pas l’intention de faire un geste pour lui faciliter la tâche il posa près d’elle les papiers d’identité qu’il avait fait faire. L’ange jeta un rapide coup d’œil à ceux-ci avant de se replonger dans son livre. Elle allait tourner une page quand elle s’arrêta en plein milieu de son geste et attrapa sa carte d’identité. Elle contempla le nom qui y était inscrit, un instant interdite avant de mordre violement dans sa sucette, explosant la boule de sucre à peine entamée entre ses dents. Se relevant elle lança sans vraiment regarder le reste du bonbon dans sa corbeille.

-Attends, c’est quoi ce bordel ! Je m’appelle Jane Smith ? Jane Smith ! T’aurais pas pu trouver mieux ?
-Tu t’y serais un peu plus intéressée, tu aurais pu choisir ton nom. Et puis c’est Jane Eleanor Smith. Tu veux manger quoi Jane ?
-Non, mais…
-Tu n’as pas faim ? C’est une première.
-C’est pas ça… Raah ! Laisse tomber. Tu t’appelles comment alors.
-Jacob White.

Les yeux de la jeune ange s’agrandirent de stupeur et elle contempla pendant un instant son contractant l’air complètement abasourdi avant d’éclater de rire. Un rire faux, grinçant, plus proche d’un aboiement que d’un vrai rire.

-Tu te fous de ma gueule ? Tu déconnes ?
-Pas du tout.
-N’importe quoi, soupira-t-elle. Bah c’est ton problème. Pourquoi on a pas le même nom cette fois ?
-Je suis ton oncle du côté de ta mère.
-Ok. Le classique j’ai plus que toi en vie, quoi. Mais, pourquoi tu as besoin d’une nouvelle identité ? Ah, oui, c’est vrai...

Plume baissa les yeux sur sa carte d’identité et soupira avant de la poser sur une desserte et de s’assoir au comptoir du bar séparant la cuisine du salon.

-Tu veux toujours pas me dire pourquoi on est en Angleterre ?
-Tu veux toujours pas me dire pourquoi tu t’éclipse sans rien me dire pour aller en Chine ou je ne sais où ?
-Mouais. Je suis persuadée que tu sais très bien ce que je fais de toute façon.

L’ange bicentenaire n’avait pas vraiment envie qu’un humain, surtout un RG, fourre son nez dans ses affaires. Un drôle de RG d’ailleurs. Enfin, quoi qu’il en soit elle avait assez de mal à s’en débrouiller comme ça pour ne pas avoir à ajouter un lié trop fouineur à l’équation et surtout pas quand ses affaires concernaient les différents entre les anges et les démons.

-Je ne voyais pas les anges comme ça... Tu es vraiment spéciale pour une ange ? Ou ils sont tous comme toi ?
-Je suis unique en mon genre.

C’était bien le genre de détail qu’elle n’avait pas envie d’éclaircir, la réelle nature des anges qui n’étaient pas exactement celle que la plus part des gens s’imaginait.

-Ah, au fait, il va falloir que tu ailles au Lycée.
-Encore ! Mais...
-Le Japon, la France, les USA et l’Angleterre sont tous différents et il faut que tu l’intègre. Tu es d’une rare efficacité quand il faut tuer mais tu manques de jugement sur les gens et le meilleur moyen d’en acquérir c’est de les côtoyer. Et quoi de mieux que le lycée ?
-Je vois deux trois réponse à cette question mais tu cherchais pas quelqu’un? C’est plus ou moins l’objet de ton dernier ordre, avec la partie où je dois te garder en vie.
-Je La cherche toujours mais je n’ai pour le moment pas besoin de ton aide.
-Ok, comme tu veux... Quand est-ce qu’on mange ?
-On mange dans une demi-heure.
-Bien. Mais, j’aurais préféré faire à manger.

L’ange à l’apparence de pré-ado soupira et pris la direction de sa chambre, pécha un livre au hasard avant de se jeter sur son lit. Elle se releva en sursaut, un feulement exaspérer, très peu humain, lui échappant. Elle s’était jetée sur un livre qui était encore sur son lit et celui-ci lui était rentré dans le flanc gauche, celui qui, malgré les années, était encore sensible à cause de la blessure infligée par le feu d’un très vieux démon. Sa survie n’avait tenu qu’a son pouvoir qui lui permettait de dissimuler sa présence.
Plume ouvrit le livre qu’elle avait attrapé et se tourna sur le côté avant de pêcher sur sa table de chevet une barre chocolaté. Elle bloqua le livre, pour qu’il reste ouvert et commença à libérer la barre chocolatée de son emballage. Elle l’ouvrit avec beaucoup de précaution, puis engloutit la barre en une seule bouchée. L’ange entreprit ensuite d’étaler le papier correctement et d’en lécher toute trace de chocolat, avant de le plier consciencieusement et d’essayer d’en faire une grue.
Ce n’était pas tellement le fait d’aller au lycée qui contrariait Plume mais plutôt le peu d’information qu’elle avait sur cette personne qu’il cherchait et sur les raisons qu’il avait. Après tant qu’Azraëlle Obaa-sama* ne se mêlait pas de lui demander un service, aller au lycée serait une activité plutôt reposante pour elle. Il fallait simplement qu’elle s’organise un peu pour parfaire son image de lycéenne, parce qu’elle avait plus la tête d’une collégienne que celle d’une lycéenne.



Jane mordit dans le bonbon au citron qu’elle suçotait, produisant un craquement sonore qui lui valut des regards surpris de ses voisins. La prof de math n’avait pas entendu ou n’en avait rien à faire. La jeune fille avait l’impression d’être en permanence sur les dents depuis que deux célestes au moins millénaire avaient pointé le bout de leur nez dans son lycée. Une contractante, même d’un démon du calibre de ce de Larochelle, elle pouvait gérer mais ça... En permanence faire attention à ne pas laisser son aura filtrer, être en permanence attentive à ses manières pour ne pas se faire démasquer... cela commençait à l’énerver et à l’effrayer. S’il n’y avait que des humains dans les parages, ses frasques un peu bizarres pouvaient passer pour des excentricités mais avec deux célestes, elles l’identifiaient comme une immortelle. Elle ne pouvait plus passer pour la zarbi au fond de la classe, un peu allumée mais amusante plutôt que dangereuse. Même si son aura restait cachée, ils additionneraient vite deux et deux. D’ailleurs en parlant de deux et deux...

-Ca colle pas, grommela-t-elle.

Jane contempla l’énoncé de l’exercice en cours et son propre cahier, couvert par son écriture serrée et soupira exaspérée. Sa main gauche agrippait sa natte qui passait par-dessus son épaule gauche, comme elle le faisait toujours quand elle était énervée. Sa main droite serrée sur son stylo, elle inspira profondément essayant de calmé sa colère et la peur sourde qui la minait depuis un bout de temps, et relâcha son stylo et sa tresse, remonta ses lunettes sur son nez et leva enfin la main. Son visage avait repris son air un peu timide et adorable qu’affectionnait Jane. The show must go on. Merde, elle appréciait ses vacances forcées finalement...

Quelque minute après son portable vibra dans sa poche, un message... « Je l’ai trouvé. Je vais avoir besoin de ton aide. » Ses vacances avaient définitivement pris fin, entre ça et les conneries d’Alix oba-san**.